Le président et chef de la direction de la firme d'ingénieurs SNC-Lavalin (T.SNC) s'est réjoui jeudi de l'annonce de la révision du protocole suivi par Ottawa pour l'attribution des contrats publics, à la lumière des récents problèmes juridiques de l'entreprise.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a accusé en février SNC et deux de ses filiales de fraude et de corruption en lien avec ses contrats en Libye.

Des contrats publics et privés totalisant plusieurs milliards de dollars pourraient être menacés si SNC-Lavalin était reconnue coupable, a fait valoir le chef de la direction, Robert Card, à la suite de l'assemblée annuelle des actionnaires de l'entreprise.

L'un de ces contrats est celui obtenu récemment par un consortium, qui comprend SNC, pour la construction du nouveau pont Champlain qui relie Montréal à la Rive-Sud.

«Nous applaudissons la révision du régime d'intégrité du gouvernement, mais nous devrions souligner qu'il ne touche que les contrats pour les projets du gouvernement du Canada», a affirmé M. Card.

Actuellement, les entreprises reconnues coupables de certains délits criminels se voient empêchées d'obtenir des contrats du gouvernement fédéral pendant 10 ans.

M. Card a réaffirmé que SNC plaiderait non coupable aux accusations, même si elle se dit prête à payer une amende pour les transgressions alléguées de ses anciens employés.

«Nous n'approuvons par les actions entreprises par ces personnes», a-t-il fait valoir. «Nous voulons trouver une solution qui témoignerait d'une responsabilité appropriée mais qui ferait en sorte que nous et nos employés puissent être protégés et aller de l'avant.»

La Couronne allègue que la société a versé plus de 47 millions $ en pots-de-vin à un ou plusieurs membres du gouvernement libyen entre 2001 et 2011 et a aussi effectué une fraude de plus de 129 millions $ dans le pays.

Selon le grand patron de SNC, la Couronne n'a pas encore terminé de présenter sa preuve contre la plus grande firme d'ingénieurs au Canada et des avocats de l'entreprise estiment que les procédures de la cour pourraient s'étaler sur cinq ans.

«Nous n'avons pas l'intention de faire durer cela aussi longtemps», a-t-il noté. «Nous espérons régler cela plus tôt.»

Il n'est toujours pas clair à quel moment le Canada annoncera les changements qu'il veut apporter à ses règles d'attribution.

Un porte-parole de la ministre des Travaux publics, Diane Finley, a dit que la révision avait débuté en mars.

«Deux experts indépendants sur les règles d'éthique dans l'attribution ont été retenus pour participer aux consultations», a indiqué Marcel Poulin dans un courriel. «Les consultations se poursuivent et tous les points de vue seront entendus avant qu'une décision soit prise sur la marche à suivre.»

Plus tôt jeudi, la société a fait état d'un bénéfice net de 104,3 millions $ pour son premier trimestre, une augmentation de 10 % par rapport à la même période l'an dernier que l'entreprise a attribué à ses efforts pour se concentrer sur ses activités de base et à une récente acquisition.

Le bénéfice par action a atteint 68 cents pour la société montréalaise, en comparaison avec un bénéfice de 94,6 millions $, ou 62 cents par action, pour le premier trimestre de 2014.

Les revenus de SNC ont avancé à 2,26 milliards $, contre un chiffre d'affaires de 1,72 milliard $ un an plus tôt, malgré une baisse des revenus liés à ses investissements dans les infrastructures.

L'entreprise s'est départie de certains de ses actifs qu'elle ne jugeait plus essentiels, comme le réseau électrique AltaLink en Alberta, pour se concentrer sur ses activités de base, soit les services de génie et de construction.

Cependant, l'abandon de ces éléments a été plus que compensé par la hausse des revenus de son segment du pétrole et du gaz naturel - qui compte désormais sur la contribution de Kentz, acquise en août -, ainsi que celle de son segment de l'énergie.

L'action de SNC-Lavalin a pris jeudi 2,36 $ à la Bourse de Toronto, soit 5,5 %, pour clôturer à 45,33 $.

Malgré les bons résultats, le président du conseil de l'entreprise, Lawrence Stevenson, a indiqué que «la reprise avait pris plus de temps que prévu» en raison des accusations criminelles.

M. Stevenson croit que SNC-Lavalin a réussi à réhabiliter son image auprès des gens «qui comptent vraiment», comme les clients et les employés.

«Clairement, il reste du travail à faire pour ce qui est de la perception plus large de la société, je crois», a-t-il ajouté.