Des banquiers spécialistes des marchés des capitaux interrogés par La Presse doutent fortement que Pierre Karl Péladeau accepte de se départir de ses actions à droits de vote multiples de Québecor. Mais le cas échéant, le titre de l'entreprise pourrait prendre de la valeur, et non en perdre.

Le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, et le chef du Parti libéral du Québec (PLQ), Philippe Couillard, exigent que Pierre Karl Péladeau vende ses actions de Québecor.

La valeur d'une action en Bourse est supportée par des éléments fondamentaux. «Si une vente est dictée par des raisons politiques, ça ne change rien aux fondamentaux d'une entreprise», nous dit le patron responsable du financement des entreprises d'une grande banque canadienne.

Une vente des actions à votes multiples détenues par PKP aurait aussi un impact important sur la structure de Québecor.

Si le contrôle ne se trouve plus lié à des actions à droits de vote multiples, l'entreprise peut devenir plus attrayante d'un point de vue évaluation parce qu'elle est plus susceptible de faire l'objet d'une acquisition.

Les experts consultés croient aussi que le titre pourrait subir une pression à la baisse si le marché devait escompter la mise en vente éventuelle d'un imposant bloc d'actions. «Mais ça serait un effet à court terme. Ça fait partie d'une mécanique de marchés», nous dit-on.

Ce type d'actions à droits de vote multiples est précieux et ne se recrée sous aucune circonstance, souligne un banquier. «PKP ne pourrait pas remettre la main sur les actions et obtenir à nouveau le contrôle, donc ça ne se fera pas. C'est impossible. Je ne le vois pas.»

Les actions à votes multiples peuvent être émises lors d'un premier appel public à l'épargne. On l'a vu, par exemple, à l'occasion de l'inscription en Bourse de Bombardier Produits récréatifs, le printemps dernier.

Il serait par ailleurs possible que des membres de la famille Péladeau détiennent le droit de se transférer entre eux des actions à droits de vote multiples, nous dit-on. «Auquel cas ils vont trouver une institution bancaire pour financer un des membres de la famille pour l'aider à mettre la main sur les actions», nous dit une source du milieu financier.

Une solution existe

Plus tôt cette semaine, deux experts en gouvernance, Yvan Allaire et Michel Nadeau, ont proposé une solution à Pierre Karl Péladeau. Celle-ci passe par un réarrangement de la structure de capital et de propriété de Québecor Média et de ses filiales.

Ils suggèrent de regrouper les publications de Québecor dans Groupe TVA (déjà inscrite en Bourse, mais détenue à 51 % et contrôlée à 99 % par Québecor Média). Une émission d'actions ou un placement privé par TVA financerait la transaction et ferait passer la participation économique de Québecor sous les 50 %. Les droits de vote devraient toutefois être ramenés au même niveau que la participation économique.

Pour que cette solution se concrétise, il faut, d'un côté, que PKP accepte que Québecor renonce à ses actions à votes multiples et, de l'autre, que les actionnaires de Québecor et du Groupe TVA, ainsi que les conseils d'administration, approuvent la transaction.