L'ère des taxis aériens n'est plus très loin, avec de premiers vols de démonstration prévus par Uber dès 2020. Une partie de la technologie nécessaire pour y parvenir pourrait être développée par Bell à Mirabel, grâce notamment à une subvention de 49,5 millions de dollars annoncée hier par le gouvernement fédéral.

L'octroi d'Ottawa, présenté hier par le ministre fédéral de l'Innovation, Navdeep Bains, dans le cadre du Forum innovation aérospatiale d'Aéro Montréal, est un élément d'un programme de recherche totalisant 178 millions de dollars. Dix-neuf organisations, dont quelques universités d'un peu partout au pays, font partie du consortium mené par Bell, jusqu'à tout récemment connue sous le nom de Bell Helicopter.

Les recherches de ce consortium sont « destinées aux hélicoptères de prochaine génération qui pourront voler avec ou sans équipage, ainsi qu'aux systèmes de vol entièrement autonomes ». Elles se concentreront sur cinq axes : moyens de propulsion alternatifs, autonomie et conscience situationnelle, commande de vol électrique à faible coût, gestion de l'énergie et technologies avancées de rotor anticouple.

Taxis aériens

Ces axes de recherche correspondent presque exactement aux principaux défis que doivent encore surmonter les entreprises impliquées dans le développement des véhicules aériens autonomes, en particulier les taxis aériens, tels que l'avaient expliqué plus tôt dans la matinée d'hier le directeur des services aériens d'Uber, Thomas Prevot, et le vice-président sénior à la technologie et à l'innovation de Bell, Michael Thacker.

Les deux entreprises sont partenaires dans le développement d'Uber Elevate, un projet de taxi aérien qui prévoit réaliser ses premiers vols de démonstration dès 2020 et entrer en service commercial dès 2023 à Dallas et à Los Angeles.

Cette entrée en service impliquerait d'abord des pilotes, ont-ils expliqué. Pas nécessairement parce que la technologie ne permettra pas de s'en passer, mais surtout pour favoriser l'acceptabilité sociale.

« Il va falloir des années avant d'accumuler suffisamment de données pour faire la démonstration que ces appareils sont sécuritaires », affirme Thomas Prevot.

Le fait pour les passagers de constater que la plupart des tâches du pilote sont en réalité automatisées permettrait aussi d'alléger progressivement leurs craintes, a-t-il ajouté en entrevue par la suite.

« Mais à long terme, on veut aller vers l'autonomie. Il y a déjà des pénuries de pilotes. Et il y a aussi une question de coûts. Il faut payer le salaire du pilote, qui occupe en plus un siège. »

Rester abordable

Et les coûts, justement, sont un élément très important du projet. Pour fonctionner, le taxi aérien doit être capable de rivaliser avec la propriété d'une voiture, estime M. Prevot. De faibles prix auront aussi une incidence sur l'acceptabilité sociale, à savoir si le grand public acceptera que le ciel soit plus encombré, par exemple.

« La clé pour l'acceptabilité sociale est que les gens aient l'impression qu'ils peuvent eux-mêmes en bénéficier, et ça passe par les coûts », a pour sa part affirmé M. Thacker.

Des progrès importants doivent encore être réalisés pour réduire le niveau d'émissions sonores de ces appareils, pour l'instant très élevé.

« Ce que les villes donnent comme signal, c'est qu'elles ne vont pas accepter de bruit plus élevé que ce que génère la circulation actuelle », explique Cynthia Garneau, présidente des opérations canadiennes de Bell.

Dans les plans d'Uber Elevate, les taxis aériens ne se déplaceraient qu'entre des zones de décollage et d'atterrissage prédéterminés, comme des héliports. Cela limiterait la pression sur le contrôle du trafic aérien. Celle-ci pourrait néanmoins rapidement devenir très forte, convient M. Prevot.

« Je ne pense pas que le système actuel sera capable de gérer cela », a-t-il convenu, avant d'expliquer que des travaux étaient effectués avec les autorités réglementaires pour déterminer des façons d'automatiser le processus ou, à tout le moins, « de trouver un processus qui ne serait pas basé sur la voix, qui permettrait de grandir plus vite ».

Même à Montréal

Uber a ciblé Los Angeles et Dallas pour son premier déploiement commercial en raison principalement des besoins qui y sont anticipés et de leur climat, plutôt stable et facile pour les déplacements aériens.

« Est-ce qu'un tel service pourrait être utilisé à Montréal dans une journée de verglas comme celle d'aujourd'hui [hier] ? », a demandé un participant. Ce serait plus compliqué, a évidemment indiqué M. Prevot.

« Pour que ce service soit utile, il doit être relativement résistant à la météo, donc oui, éventuellement il pourra sortir dans une journée comme aujourd'hui [hier] », a ajouté M. Thacker.