L'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale (AIMTA) n'anticipe pas des négociations trop acrimonieuses pour le renouvellement du contrat de travail des employés de la C Series de Bombardier une fois qu'Airbus aura pris le contrôle du programme.

Alors que les conventions collectives des travailleurs viennent à échéance le 30 novembre, le syndicat revient d'une mission en France où il a rencontré les trois principaux syndicats français de l'aérospatiale - la Confédération générale du travail (CGT), la Confédération française démocratique du travail (CFDT) et la Force ouvrière (FO) - dans le but d'en apprendre davantage sur leurs relations avec Airbus et de conclure une «alliance internationale».

En brossant le bilan, lundi, le coordonnateur québécois de l'AIMTA, David Chartrand, s'est montré plutôt rassuré, rappelant, au cours d'un entretien avec La Presse canadienne, qu'il y avait déjà une culture syndicale assez forte dans l'Hexagone à laquelle étaient habituées les entreprises.

«La relation entre les syndicats et l'entreprise nous ressemble beaucoup plus au niveau de notre culture ici au Québec que les échanges aux États-Unis entre les sociétés et leurs syndicats», a-t-il expliqué, en marge du Forum innovation aérospatiale organisé par Aéro Montréal.

M. Chartrand s'est ainsi dit «content» de négocier avec la société française plutôt, par exemple, qu'avec Boeing - qui aurait pu être le partenaire de Bombardier dans la C Series.

Puisque quelque 2000 travailleurs de Mirabel se dirigent «vers l'inconnu» en matière de renouvellement de convention collective, les rencontres entre l'AIMTA et les syndicats français visaient principalement à en apprendre davantage sur les façons de faire de l'avionneur européen.

«On sait qu'en Europe, il y a un comité avec Airbus sur lequel tous les syndicats impliqués ont un siège, a dit M. Chartrand. Nous, on ne fait pas partie de ce groupe. Nous voulions tisser des liens pour obtenir des informations auxquelles nous n'avions pas accès.»

Selon lui, les syndicats français voient d'un «bon oeil» le rapprochement entre Bombardier et Airbus, et ce, même si la C Series occupe le même segment de marché que le A 318, dont les ventes sont toutefois au neutre.

Particularités et inquiétude

L'AIMTA attend toujours que se finalise le partenariat entre les avionneurs québécois et européen en vertu duquel le géant français deviendra l'actionnaire majoritaire de la C Series - avec une participation de 50,1% - sans avoir à verser un sou.

En mars, les travailleurs de Bombardier ont accepté une entente de réciprocité qui sera ajoutée au contrat de travail des syndiqués de Bombardier Aéronautique. Il devrait ainsi y avoir des «passerelles» entre les conventions des employés de la société québécoise représentés par l'AIMTA et ceux sous l'égide de la Société en commandite Avions C Series.

Cette situation fera en sorte que les négociations seront particulières, puisque l'AIMTA représentera d'un côté quelque 2000 travailleurs de la société en commandite et de l'autre, près de 3000 salariés répartis dans d'autres unités de Bombardier, comme les avions d'affaires.

«Il y a définitivement un caractère plus spécial, a dit M. Chartrand. Il s'agit aussi de deux employeurs qui ne sont pas dans la même situation. Les leviers de négociations vont être différents à chacune des tables.»

Le syndicat n'a pas encore été approché pour entamer les pourparlers. Cela devrait toutefois changer une fois que l'alliance entre Bombardier et Airbus aura été confirmée, a estimé le coordonnateur québécois de l'AIMTA.

Malgré un optimisme grandissant, M. Chartrand n'a pas caché que la ligne d'assemblage de la C Series que l'on prévoit construire à Mobile, en Alabama, demeurait une source d'inquiétude pour les travailleurs québécois de Bombardier à Mirabel.

«On va se faire comparer à des endroits où il n'y a pas de syndicat, a estimé M. Chartrand. Bombardier nous compare déjà avec le Mexique parfois. Cela se fait déjà et ça sera la même chose avec le site de Mobile. Des sites non syndiqués, c'est sûr que cela tire les conditions de travail vers le bas.»

L'AIMTA et les trois syndicats français ont convenu de poursuivre leur collaboration. Les machinistes devraient accueillir une délégation française prochainement.