La possibilité d'un conflit de travail chez Postes Canada dès demain inquiète au plus haut point les commerçants en ligne, pour qui l'entreprise est un partenaire vital.

« Il n'y a pas vraiment de façon de se préparer à ça autre que de se dépêcher à envoyer nos commandes le plus rapidement possible et ne prendre aucun retard », confie Nicolas Dubeau, responsable des opérations chez le détaillant en ligne Poche et fils.

La jeune entreprise de vêtements est cliente de Postes Canada depuis ses débuts.

« Ils ont les meilleurs tarifs et le service est excellent. Surtout, si le client n'est pas là au moment de la livraison, il y a toujours un bureau pas trop loin pour aller récupérer sa commande. »

Changer de fournisseur impliquerait des changements aux logiciels de l'entreprise mais, surtout, est impossible, a appris M. Dubeau.

« J'ai contacté nos représentants d'UPS et Fedex. Nous envoyons environ 150 colis par jour et ils sont débordés, ils n'ont pas cette capacité présentement.

« On n'a pas d'autre choix que de se fier à la patience de nos clients. Le conflit est très médiatisé et nous allons les informer. »

LOI SPÉCIALE EN 2011

En 2011, il avait fallu 12 jours de grèves tournantes et deux semaines de lock-out avant que le gouvernement de Stephen Harper n'impose une loi spéciale. M. Dubeau espère que la situation sera réglée plus rapidement cette fois, en raison notamment des progrès réalisés par le commerce électronique depuis.

Selon le CEFRIO, la proportion de Québécois ayant réalisé un achat sur l'internet dans le mois précédent son enquête annuelle est passée de 25 % en 2011 à 32 % en 2015. L'organisme estime aussi que le volume total d'achats des Québécois sur l'internet est passé de 5,62 milliards en 2011 à 8 milliards de dollars en 2015.

Amazon, l'un des plus importants clients de Postes Canada, a décliné notre demande d'entrevue. Sur son site web, l'entreprise explique qu'en prévision d'un conflit, elle a déjà suspendu les livraisons à des boîtes postales, des lieux de ramassage ou des lieux éloignés non desservis par d'autres fournisseurs.

REPLI VERS L'INTERNET

Pour leur part, les grands fournisseurs de services Bell, Vidéotron et Hydro-Québec ont commencé il y a déjà quelques jours à inciter leurs clients à se tourner vers l'internet en cas de conflit.

Dans un courriel envoyé à sa clientèle, Bell rappelle que « puisque vous demeurez responsable de payer vos factures à temps, et afin d'éviter des frais de retard, nous vous invitons à utiliser un des modes de paiement suivants », avant d'énumérer son site internet, un numéro téléphonique et le paiement par le truchement des institutions bancaires. La situation est similaire chez Vidéotron.

« Le point de départ est que les clients doivent payer et respecter l'échéance », rappelle de son côté Marc-Antoine Pouliot, porte-parole d'Hydro-Québec.

À la fin mai, la grande majorité des clients de la société d'État (73 %) recevaient encore leur facture par la poste. La menace d'un conflit a toutefois fait descendre ce nombre plus rapidement qu'à l'habitude au cours des derniers jours, selon M. Pouliot.

À peine 4,7 % des abonnés paient leur facture par la poste. En cas de conflit, les clients d'Hydro-Québec dépourvus d'un accès à l'internet pourront appeler pour connaître leur solde, puis acquitter celui-ci au comptoir de leur institution bancaire ou encore directement au siège social du centre-ville de Montréal, une option dont un nombre anecdotique de clients se prévaut toujours, selon M. Pouliot.