Près de 3000 postes menacés à court terme, retrait de 14 avions long-courriers et suppression de 5 lignes: le «plan B» d'Air France se précise après l'échec des négociations avec les pilotes, la direction n'envisageant toutefois des licenciements qu'«en dernier recours».

Air France a esquissé vendredi en conseil d'administration les grandes lignes du plan de restructuration amené à remplacer son projet initial «Perform 2020», tourné vers la chasse aux coûts et la croissance.

Devant les administrateurs, la direction a évalué à 2900 postes le sureffectif induit par une baisse d'activité à court terme, ont indiqué des sources syndicales à l'AFP.

Le nombre d'emplois menacés serait ainsi de «300 pilotes, 700 PNC (agents de bord) et 1900 au sol», a détaillé l'une d'elles.

Selon Didier Dague, administrateur (FO) représentant des salariés d'Air France, la direction privilégie des plans de départ volontaires (PDV) pour les navigants. Mais si elle ne trouve pas assez de candidats, elle n'exclut pas des licenciements.

Pour les personnels au sol, il n'y aurait «que des plans de départs volontaires», relate un autre syndicaliste, qui redoute cependant «quelques licenciements» dans les escales du Sud-Est (Marseille, Nice, Corse) faute de volontaires en nombre suffisant.

Plusieurs syndicats ont appelé ces personnels à faire grève lundi, au moment où la direction fera ses annonces officielles en comité central d'entreprise.

Contactée, la direction de la compagnie, qui comptait 52 500 salariés fin 2014, n'a pas souhaité commenter les chiffres cités.

Le PDG d'Air France-KLM, Alexandre de Juniac, a cependant affirmé vendredi vouloir «privilégier les départs volontaires» et procéder «en dernier recours» à des licenciements.

Soutien du gouvernement 

Air France a indiqué depuis plusieurs semaines qu'elle procèderait à une réduction de 10 % de son offre long-courrier en cas d'échec des négociations avec les syndicats de navigants sur Perform. Elle dispose d'une flotte de 131 appareils, dont 109 long-courriers.

La compagnie retirera «cinq avions à l'été 2016», puis «neuf autres» en 2017, en plus de la fermeture de cinq lignes sur le réseau long-courrier à une date non précisée, a indiqué Didier Fauverte (CGT), présent au conseil d'administration en qualité de secrétaire du CCE.

Des «réductions de fréquences ou de capacité» sont également prévues sur certaines lignes du réseau long-courrier, a-t-il ajouté.

Selon une autre source syndicale, l'entreprise pourrait cependant renoncer au retrait des neuf avions en cas d'accord avec les pilotes sur de nouvelles mesures de productivité.

Mais en cas de nouvel échec, plusieurs milliers de suppressions de postes pourraient à nouveau intervenir, a-t-elle prévenu.

Sur le long-courrier qui faisait autrefois sa force, la compagnie tricolore a perdu des plumes face à la montée en puissance des compagnies asiatiques et, surtout, du Golfe (Emirates, Qatar Airways, Etihad). Son réseau est actuellement déficitaire pour moitié, Air France vise 80 % de lignes rentables en 2017.

L'État, en sa qualité d'actionnaire d'Air France (17,6 %), a appelé à la reprise des négociations entre syndicats et direction, pointant du doigt la responsabilité des pilotes.

Le premier ministre Manuel Valls a invité jeudi «à trouver les bonnes solutions pour l'avenir d'Air France», ajoutant que «chacun doit participer à l'effort, notamment les pilotes».

Le gouvernement «appuie» la direction et appelle les syndicats à «prendre leurs responsabilités», a renchéri vendredi le ministre de l'Économie Emmanuel Macron, après une rencontre avec M. de Juniac.

Le patron d'Air France-KLM a fait savoir que «la porte [n'était] pas fermée» aux organisations syndicales si «elles reviennent avec un vrai projet, une vraie volonté de discuter».

«C'est à nous d'avoir un projet, lui n'en a aucun!», a ironisé le président du syndicat de pilotes majoritaire SNPL, Philippe Evain, interrogé par l'AFP.

La direction réclamait aux personnels navigants de voler une centaine d'heures de plus par an, à rémunération constante, un projet unanimement rejeté par les syndicats.

Le représentant du SNPL a dénoncé «une parodie de négociation», Air France ayant fait du plan B sa priorité depuis le début, selon lui.