L'équipe derrière le chasseur français Rafale ne s'attend pas à ce que le gouvernement canadien lance une véritable compétition pour remplacer ses CF18 avant les élections, mais elle poursuit ses efforts de séduction.

Dassault Aviation a profité du Salon aéronautique du Bourget pour rencontrer des journalistes canadiens et faire une démonstration sur simulateur des capacités de l'avion de chasse.

«Nous ne considérons pas que c'est joué d'avance», a soutenu Yves Robins, vice-président responsable des affaires de l'Union européenne et de l'OTAN au sein de Dassault Aviation.

Ottawa avait fait part de son intention d'acquérir 65 chasseurs F-35 de Lockheed Martin (le Joint Strike Fighter) pour remplacer ses CF18 vieillissants. Après avoir essuyé les critiques du Vérificateur général et du directeur parlementaire du budget, le gouvernement conservateur a lancé un nouveau processus pour évaluer le F-35 et ses concurrents, soit le Rafale de Dassault, le F-18 Super Hornet de Boeing et l'Eurofighter Typhoon d'Airbus.

Il n'y a pas eu grand développement dans ce dossier au cours des derniers mois, au grand déplaisir de Dassault.

«Nous aurions voulu un peu plus de retour sur les informations que nous avons fournies au gouvernement il y a deux ans, a déclaré M. Robins. Selon moi, il n'y aura pas de compétition ouverte avant les élections. S'ils l'avaient voulu, ils auraient eu amplement l'occasion de le faire. Quant à ce qui se passera après les élections, personne ne le sait.»

Succès à l'exportation

L'équipe derrière le Rafale est gonflée à bloc à la suite de récents succès sur le marché de l'exportation. Au tournant de 2015, Dassault n'avait vendu aucun Rafale à l'étranger. Son seul client était l'armée de l'air française. Récemment, tout a changé. En février dernier, l'Égypte a commandé 24 appareils. Peu de temps après, le Qatar a également commandé 24 appareils, un contrat assorti d'options pour 12 appareils supplémentaires. Enfin, l'Inde a annoncé son intention d'acquérir 36 appareils.

«Les motivations d'un pays pour acheter un appareil sont toujours complexes, a déclaré M. Robins. Il faut un alignement d'étoiles. C'est un mélange de considérations techniques, opérationnelles, financières et politiques.»

Le Rafale est un appareil entièrement français. Il n'est donc pas soumis aux restrictions mises en place par le gouvernement américain pour limiter l'exportation de technologies liées à la défense, l'ITAR (International Traffic in Arms Regulations).

Plein la vue

Dassault a mis l'accent sur le Rafale pendant le salon aéronautique du Bourget. L'appareil a effectué des vols de démonstration tous les jours, alors que le F-18 et le F-35 brillaient par leur absence et que le Typhoon est demeuré au sol.

Pendant le salon, une délégation de représentants de Travaux publics Canada, d'Industrie Canada et du ministère de la Défense a visité les entreprises impliquées dans le processus de remplacement.

«Nous leur avons donné tous nos arguments, a déclaré M. Robins avant la rencontre. Nous allons les écouter et leur faire part des améliorations apportées depuis deux ans.»

Dassault n'est pas à court d'arguments: l'appareil peut accomplir des tâches extrêmement différentes au cours d'une même mission; il a montré, notamment en Afghanistan, qu'il pouvait travailler de concert avec d'autres types d'appareils; il a toutes les caractéristiques d'un appareil de nouvelle génération avec ses équipements avioniques. Mais surtout, c'est une valeur sûre parce qu'il s'agit d'un appareil existant qui a fait ses preuves.

«Son prix est fixe, ses coûts d'exploitation sont connus, il n'y a pas de surprise», a lancé M. Robins, faisant allusion implicitement au F-35.

Il a affirmé que le Canada pourra bénéficier de retombées industrielles s'il choisit le Rafale. Les entreprises canadiennes pourraient participer à la chaîne d'approvisionnement du Rafale ou d'autres produits de Dassault, ou encore des produits des partenaires de Dassault dans le programme Rafale, comme Thales et Snecma.

Dassault n'entend cependant pas annoncer de partenariats avec des entreprises canadiennes avant une décision définitive de la part du gouvernement canadien.

«Nous savons qu'il y a plusieurs entreprises canadiennes qui sont impliquées dans le F-35, a noté M. Robins. Il serait un peu problématique pour elles de montrer de l'intérêt envers le Rafale à ce moment-ci.»