Le gouvernement fédéral présentera un projet de loi pour forcer les 3300 employés du Canadien Pacifique (CP), en grève depuis 0h01 lundi matin, à retourner au travail. D'ici là, les usagers des trains de banlieue devront s'armer de patience puisque le service sera interrompu sur les lignes de Saint-Jérôme, Vaudreuil-Hudson et Candiac.

Un projet de loi sur la reprise des services ferroviaires a été inscrit à l'ordre du jour des travaux parlementaires et sera donc débattu dès lundi.

«Si les parties n'arrivent pas à s'entendre ou si le syndicat n'accepte pas de soumettre le différend à l'arbitrage volontaire, le gouvernement prendra des mesures pour protéger l'économie canadienne», a déclaré la ministre du Travail Kellie Leitch, dans un courriel envoyé à La Presse.

Stéphane Lacroix, porte-parole de la Conférence ferroviaire de Teamsters Canada, n'est pas surpris de cette décision puisque le gouvernement a déjà voté une loi spéciale pour mettre fin à une grève des travailleurs du CP, en 2012.

Usagers «pris en otage»

Mais, contrairement au conflit précédent, aucun service ne sera offert, cette fois, aux usagers des trois lignes de train de l'Agence métropolitaine de transport (AMT) qui sont exploitées par le CP.

«Nos 19 000 clients, qui n'ont rien à voir avec ce conflit, se retrouvent pris en otage. Le comportement des parties à notre endroit est totalement inacceptable», a déploré le président-directeur général de l'AMT, Nicolas Girard, au cours d'un entretien.

L'AMT étudie «sérieusement» la possibilité de déposer lundi une nouvelle demande d'injonction afin qu'un service soit offert aux heures de pointe, après avoir essuyé un premier refus vendredi.

L'Agence mettra à la disposition des usagers une soixantaine d'autobus, mais ils seront en nombre nettement insuffisant, puisqu'il en aurait fallu au moins 700 de plus. «Il n'y en avait pas plus de disponibles», a indiqué M. Girard. Le PDG de l'AMT ne pouvait confirmer, dimanche, qui réglerait la facture qui découlera de cette grève.

Le ministre québécois du Transport, Robert Poëti, précise de son côté qu'il est en contact quotidiennement avec le gouvernement fédéral. «Ma demande est simple: que le transport des passagers soit considéré comme un service essentiel», a-t-il insisté.

Il ajoute que le syndicat a déjà un levier économique important dans ce conflit sans avoir à nuire aux déplacements des passagers. Le transport de marchandises est en effet particulièrement touché.

«La grève au CFCP [le Teamsters] aura de graves répercussions sur l'économie canadienne, a fait savoir la ministre Leitch. Elle coûtera au Canada environ 205 millions de dollars par semaine.»

Le syndicat se défend

M. Lacroix a indiqué que le syndicat se devait d'envoyer un message fort puisque ses demandes sont ignorées depuis 2012. «On avait offert un service aux passagers en 2012 en disant au gouvernement et au CP que la question des heures de repos devait être réglée et rien n'a été fait depuis.»

Les deux parties ne sont pas parvenues à une entente samedi et les principaux points de litige concernent notamment l'installation de caméras de surveillance à bord des locomotives et les heures de repos obligatoire.

Le syndicat s'est dit désolé des inconvénients auprès des usagers, mais rappelle que l'enjeu est une question de santé et de sécurité qui concerne tout le pays. «On avait le choix de ne pas faire de grève et de courir un risque de faire rouler les trains, car nos travailleurs sont épuisés, ou de faire la grève», a-t-il dit, accusant au passage le CP d'avoir négocié mollement afin de faire mal paraître le syndicat tout en sachant que le gouvernement interviendrait.

Si une loi était votée, le Teamsters compte toutefois la respecter. «Voilà ce qui va se passer, dit M. Lacroix. Une loi nous forcera à retourner travailler et on va le faire, mais rien ne sera réglé et dans trois ans tout sera à recommencer... En attendant, on va prier pour qu'il n'y ait pas de déraillement en raison de la fatigue des conducteurs.»

Guide de survie des usagers

• Environ 60 autobus seront mis à la disposition des usagers de l'AMT. Les départs ne se feront pas aux heures habituelles. Les autobus seront surtout présents aux heures de pointe et se rendront à différentes stations de métro.

• Le service de navette est gratuit pour ceux qui possèdent un titre mensuel.

• Certains clients de la Rive-Sud pourront se rabattre sur la ligne Mont-Saint-Hilaire; l'AMT ajoutera des voitures de train.

• La Société de transport de Montréal (STM) ajoutera des voitures de train sur la ligne verte de métro aux heures de pointe.

• L'AMT encourage les usagers à privilégier le covoiturage.

• Ceux qui possèdent un titre mensuel TRAIN pourront se présenter à l'une des billetteries de l'AMT pour obtenir un titre TRAM de la même zone sans frais additionnels.