Il faudra vraisemblablement du temps à Bombardier (t.bbd.b)  avant de rassurer les grandes agences de notation, qui estiment que la marge de manoeuvre de la société montréalaise est désormais quasi inexistante.

Moody's et Dominion Bond Rating Service (DBRS) ont décoté la société, alors que Standard & Poor's a réaffirmé sa cote de «B+» avec perspectives négatives, soulignant au passage que l'entreprise devra faire preuve d'une exécution presque parfaite en 2015.

«La situation financière de l'entreprise va demeurer sous pression à court terme, écrit l'analyste Viktor Vorobiev, de DBRS. Il y a encore de l'incertitude parce que les actionnaires doivent voter sur le plan de financement.»

En plus de voir Pierre Beaudoin céder le poste de président et chef de la direction à Alain Bellemare, Bombardier a fait part jeudi de son l'intention de recourir aux marchés pour obtenir jusqu'à 2,2 milliards de dollars.

Standard and Poor's, qui avait décoté l'entreprise le mois dernier dans la foulée de l'interruption du programme Learjet 85, a prévenu vendredi que Bombardier devrait mettre fin à ses «problèmes d'exécution» dans sa division aéronautique.

«Si les performances de l'année ne correspondent pas à nos attentes et prévisions (...) il est très probable qu'il y ait une décote de notre part», a affirmé en entrevue son analyste Jamie Koutsoukis.

Pour sa part, Moody's justifie sa décote - annoncée la veille - par les importantes dépenses en capital et les retards dans des programmes comme celui de la CSeries. Dans une note de recherche, un vice-président, Darren Kirk, écrit que Moody's va suivre Bombardier de près au cours des prochaines semaines.

«Les sommes requises pour compléter le programme de la CSeries devrait faire en sorte que l'entreprise utilisera probablement plus qu'un milliard de dollars en flux de trésorerie en 2015», souligne-t-il.

Standard & Poor's et Moody's s'inquiètent de voir les coûts du nouvel avion commercial de Bombardier atteindre 5,4 milliards $ US, par rapport à 4,23 milliards $ US, puisque les essais en vol ont été interrompus pendant plus de trois mois en raison de l'explosion d'un moteur.

DBRS a soulevé de son côté que la division du transport ferroviaire était capable d'absorber certains retards, mais qu'un autre problème qui retarderait les premières livraisons de la CSeries - prévues d'ici la fin de l'année - serait «intolérable».

Quant à la possible «consolidation de l'industrie» évoquée par les dirigeants de Bombardier, Mme Koutsoukis ne croit pas que cette déclaration se traduira nécessairement la vente d'actifs.

«L'entreprise a utilisé une certaine formulation pour faire comprendre au marché qu'elle est ouverte aux propositions et qu'elle évalue ses options», observe-t-elle.

De son côté, Benoit Poirier, de Desjardins Marchés des capitaux, a évoqué dans un rapport des partenariats, entre autres avec la Chine, pour des appareils comme les appareils CSeries ou Q400.

À l'instar de plusieurs analystes, Mme Koutsoukis accueille favorablement l'arrivée d'Alain Bellemare - qui a passé 18 ans chez United Technologies - à la tête de Bombardier.

L'analyste de Standard & Poor's estime que M. Beaudoin a réalisé qu'il y avait des problèmes du côté de la division aéronautique et qu'il était nécessaire d'agir.

«M. Bellemare est très respecté dans ce secteur, a-t-elle dit. C'est un pas dans la bonne direction.»

Personne n'était disponible du côté de Fitch pour commenter. L'agence de notation a réitéré son évaluation de «BB-», qui est toutefois accompagnée perspectives négatives.

Entre-temps, l'action de Bombardier a reculé de 11 cents, ou 4,1 pour cent, à la Bourse de Toronto, pour terminer la séance à 2,58 $.

Il s'agit d'une glissade beaucoup moins importante que celle survenue après l'annonce de la suspension du programme Learjet 85, le mois dernier, et du licenciement d'environ 1000 personnes. Le titre de Bombardier s'était alors rapproché d'un creux de six ans.