Le principal syndicat de pilotes d'Air France a annoncé samedi la reconduction de la grève jusqu'à vendredi prochain et en a appelé au premier ministre face à une «situation de blocage», au sixième jour d'un mouvement soutenu, avec plus de la moitié des avions sur le tarmac.

Le SNPL AF Alpa, qui avait initialement déposé un préavis de grève courant du 15 au 22 septembre, avait déposé un nouveau préavis jusqu'au vendredi 26, et appelé ses adhérents à se prononcer sur la poursuite du mouvement.

Ils ont voté à 80,93 % pour la prolongation, le taux de participation étant à un niveau «historique» de 73,71 %, a annoncé à l'AFP samedi à la mi-journée le président du syndicat, Jean-Louis Barber.

Il n'a pas exclu que la grève se poursuive au-delà du 26 si la situation de «blocage» avec la direction persistait. Le conflit est d'ores et déjà le plus long depuis le mouvement social de 1998, qui avait duré dix jours.

Le SNPL (majoritaire chez les pilotes avec environ 70 % des voix) en a appelé au premier ministre en réitérant sa demande de le rencontrer, espérant qu'il «aura à coeur de s'intéresser à la sauvegarde de l'emploi français».

Manuel Valls avait appelé mercredi les pilotes à «arrêter» leur grève, qui n'est selon lui «pas comprise».

Air France avait pour sa part «déploré» dès vendredi soir la poursuite éventuelle de la grève, le PDG de la compagnie, Frédéric Gagey, regrettant que les «propositions concrètes» faites aux pilotes «n'aient trouvé aucune réponse raisonnable à ce jour».

La compagnie a annoncé qu'elle prévoyait d'assurer dimanche 38 % de ses vols contre 45 % samedi, évaluant le taux de grévistes à 65 % pour cette journée contre 60 % samedi.

De son côté, le deuxième syndicat de pilotes à Air France (SPAF) a déjà décidé vendredi d'étendre de deux jours son préavis de grève reconductible, également prévu jusqu'à lundi initialement.

Craintes de «dumping social»

Dans les aéroports, les taux d'annulation restaient importants samedi dans certaines villes comme Marseille (81 % des vols Air France annulés), Toulouse (65 % des vols annulés au départ), Lille (50 %, avec 100 % d'annulations prévues pour dimanche), Lyon (43 %) et Strasbourg (40 %).

La compagnie aérienne à bas coûts Easyjet a annoncé qu'elle mettait en place des vols supplémentaires sur les liaisons Paris-Toulouse, Paris-Nice et Lyon-Toulouse, représentant «plus de 2000 sièges supplémentaires».

Le conflit se cristallise autour de la compagnie à bas prix du groupe, Transavia, dont Air France-KLM veut développer la flotte pour faire face à la concurrence.

Selon M. Barber, «le projet de délocalisation de la direction est désormais avéré, puisqu'elle demande que Transavia Europe, compagnie de droit étranger, touche le sol français». Il a décrit le SNPL comme «un syndicat responsable, qui est aujourd'hui trahi par le management».

Les projets d'Air France suscitent en effet chez les pilotes des craintes de «dumping social» et de «délocalisations» au détriment des emplois français.

Après avoir proposé mardi de limiter temporairement l'extension de Transavia à 30 avions en France jusqu'en 2019, Air France a mis sur la table mercredi une deuxième offre: conclure avec les syndicats un accord délimitant les activités de Transavia.

Une proposition «largement insuffisante», pour M. Barber et «pas acceptable» pour le SPAF.

Faute d'avancées dans les discussions, le ton est monté dans la semaine.

«J'en viens à me demander s'il y a vraiment [chez les syndicats] une volonté de négocier», a observé jeudi le PDG d'Air France KLM, Alexandre de Juniac, en rappelant que la grève coûte chaque jour «10 à 15 millions d'euros» à la compagnie qui «sort à peine la tête de l'eau».

Le PDG a repoussé la demande des syndicats d'un contrat de pilote unique pour les gros avions de toutes les compagnies du groupe et les discussions ont pris des airs de dialogue de sourds.