L'actionnaire majoritaire de Malaysia Airlines (MAS) va prendre le contrôle intégral de la compagnie nationale malaisienne avant sa restructuration, devenue inévitable après les catastrophes des vols MH370 et MH17 qui ont considérablement aggravé ses difficultés opérationnelles.

Le fonds d'investissement public Khazanah Nasional, actionnaire de MAS à 70 %, va racheter les 30 % restants détenus par des actionnaires minoritaires pour s'assurer toute latitude dans le sauvetage de l'entreprise qui perd entre un et deux millions de dollars par jour.

Les titres MAS cotés à la Bourse de Kuala Lumpur avaient été suspendus avant cette annonce.

En juin, Khazanah avait fait savoir qu'il dévoilerait ses intentions dans les six ou 12 mois, mais la destruction en vol d'un Boeing MAS au-dessus de l'Ukraine le 17 juillet a exacerbé les problèmes de la compagnie, dont la trésorerie ne lui laisserait que quelques mois de répit.

Pour «ressusciter» le transporteur, l'actionnaire de référence juge indispensable «un remaniement complet» de «ses opérations, son modèle d'affaires, ses finances, son capital humain et ses statuts».

«C'est le mal nécessaire pour ressusciter notre compagnie aérienne nationale et faire en sorte que ses opérations commerciales redeviennent rentables», a souligné Khazanah, en promettant des propositions pour la fin du mois.

Il n'a guère précisé son projet, mais il devrait notamment tailler dans les effectifs pléthoriques perçus comme l'un des maux qui plombent la compagnie depuis des années, en sus d'une gestion médiocre et d'une concurrence effrénée dans le secteur aérien en Asie.

L'annonce de Khazanah doit être approuvée par le conseil d'administration de la compagnie.

MAS a perdu 4,1 milliards de ringgits au total (environ 1,4 milliard de dollars) de 2011 à 2013. Et 443 millions de ringgits supplémentaires au premier trimestre 2014, en raison de «la chute vertigineuse» des réservations après l'affaire du MH370, selon elle .

«Changer de coeur et de cerveau»

Les analystes estiment que Khazanah devra faire le ménage dans l'encadrement de la compagnie, y compris au plus haut niveau, supprimer des emplois et renoncer à certaines destinations afin de redresser tant ses comptes que sa réputation.

«Elle a besoin d'un nouveau coeur et d'un nouveau cerveau. Telle qu'elle fonctionne aujourd'hui, elle est condamnée», avertit Shukor Yusof, du cabinet d'expertise aéronautique Endau Analytics.

«Chaque jour qui passe nuit à sa réputation et à sa santé financière», selon lui.

Les faiblesses structurelles de Malaysia Airlines ont été décuplées par la disparition à ce jour inexpliquée d'un Boeing transportant 239 personnes entre Kuala Lumpur et Pékin le 8 mars.

L'écrasement du MH17, le 17 juillet dans l'est de l'Ukraine, et la mort des 298 personnes à bord lui a porté le coup de grâce.

Un changement de cap est de ce fait indispensable, mais certains observateurs mettent en doute les compétences de Khazanah dont les précédentes initiatives ont échoué.

«Je ne parierais pas sur la capacité de Kazanah à réformer la compagnie en profondeur. Je suis très sceptique», admet Shukor Yusof.

Kazanah doit décapiter MAS et faire appel à des dirigeants de dimension internationale, comme l'ont fait d'autres compagnies asiatiques en délicatesse, Korean Airlines et l'indonésienne Garuda notamment.

MAS «doit se réformer en interne, changer ses procédures et ses protocoles de sécurité, puis communiquer de façon transparente sur ces évolutions auprès des consommateurs. Il faut probablement une nouvelle direction pour cela», avance Scott Hamilton, de la société de conseil aéronautique Leeham Co.

Les coûts doivent être réduits via des suppressions de postes et de dessertes long-courriers déficitaires, maintenues en dépit du bon sens pour une question d'image de marque, selon Mohshin Aziz, analyste chez Maybank qui préconise également la vente d'avions.

MAS emploie 19 500 personnes. En comparaison, la prestigieuse Singapour Airlines emploie 23 800 personnes alors que ses opérations sont beaucoup plus étendues.

Ismail Nasaruddin, président du Syndicat national des hôtesses et stewards, craint «des milliers» de licenciements.