Le TGV a beau faire la fierté de la France, sa rentabilité diminue dangereusement (elle est passée de 18% en 2007 à 11% en 2013). La société d'État qui l'administre songe à réduire de plus de la moitié le nombre de trajets, selon un article publié récemment dans Les Échos. Le principal problème est que les gares des lignes les plus rentables sont déjà exploitées au maximum aux heures de pointe. État de la situation avec l'économiste Yves Crozet, professeur au laboratoire d'économie des transports de l'Université de Lyon.

Les trois plans à l'étude

La Société nationale des chemins de fer français (SNCF) étudie actuellement trois plans pour assurer à long terme la survie financière du TGV, selon le quotidien financier Les Échos. Première option: faire passer le nombre de liaisons par TGV de 180 à 80 en 10 ans, ne garder que les lignes les plus rentables et affecter aux autres des trains ordinaires (qui sont subventionnés par l'État, au contraire du TGV). Les élus locaux risquent toutefois de ne pas aimer ce plan. Deuxième option: diminuer le prix des billets de 10% à 20% et hausser le nombre de trains quotidiens, ce qui coûterait toutefois 400 millions par an. Troisième option: garder les paramètres actuels mais réduire les coûts d'exploitation et améliorer la marge de profit de 1% par an.

Les problèmes du TGV

1) Des gares saturées aux heures de pointe

«La SNCF ne peut pas ajouter des trains aux heures de pointe, qui sont les plus rentables, car les gares sont déjà pleines à ces heures», dit l'économiste Yves Crozet, professeur au laboratoire d'économie des transports de l'Université de Lyon.

La solution: agrandir les gares les plus fréquentées. Le gouvernement a déjà prévu des travaux à la gare Saint-Lazare, à Paris, et à la gare de Marseille.

2) Des billets de dernière minute trop chers

«La SNCF fait payer très cher les billets de dernière minute, dit le professeur Yves Crozet. Le TGV est en concurrence avec l'avion, souvent moins cher, la voiture et le covoiturage, populaire auprès des jeunes.»

La solution: varier le prix des billets durant les heures creuses. «En Allemagne, les prix des billets sont plus réguliers, dit-il. Ils changent d'un jour à l'autre, mais pas toujours dans le même sens. Ça attire les clients.»

3) Pas plus de clients

Le nombre de clients du TGV est passé de 127,5 millions en 2012 à 126,9 millions en 2013, soit une baisse de 0,5%. Depuis cinq ans, le nombre de clients a augmenté de seulement 1,1% sur le territoire français et de 20,7% sur les lignes internationales (ex.: Eurostar vers Londres).

La solution: en avril 2013, la SNCF a lancé OuiGo, un TGV sans première classe ni voiture-restaurant. «Ça ne marche pas très bien parce que OuiGo utilise des gares plus éloignées des centres-villes, les gares principales étant déjà saturées», dit le professeur Yves Crozet.

4) Trop de liaisons

Alors que la SNCF évalue la possibilité de ramener le nombre de dessertes de 180 à 80, elle devra en inaugurer 4 d'ici 2017: Tours-Bordeaux, Nantes-Rennes, Paris-Strasbourg et Nîmes-Montpellier-Perpignan.

La solution? Yves Crozet ne la connaît pas. «L'État est schizophrène: il demande à la SNCF d'augmenter sa productivité tout en lui demandant de développer un trafic qui n'est pas rentable.»

En France, le TGV n'est pas subventionné, au contraire des trains ordinaires. «Comme le TGV est essentiellement un service commercial où 80 % de la clientèle est aisée, ça reviendrait à subventionner les vols en classe affaires en Amérique du Nord», dit le professeur Crozet.