Bombardier (T.BBD.B) a fait savoir hier qu'elle sera prête à faire le point dans les prochains jours sur l'incident impliquant un moteur de la CSeries. Une semaine jour pour jour après l'événement, l'enquête se poursuit, et tous les appareils de la CSeries restent cloués au sol. Si l'incertitude et l'inquiétude continuent de peser sur Bombardier, il y a tout de même lieu de souligner quelques éléments «positifs» afin de mettre la situation en perspective.

Il semble que l'avion endommagé pourra être réparé. Bombardier n'aura donc pas à radier son investissement dans cet appareil et, surtout, l'entreprise ne se retrouvera pas avec un appareil en moins pour poursuivre sa période d'essais.

La défaillance observée survient relativement tôt dans la phase de tests, et non pas à un moment où une quinzaine d'avions sont en production pour être livrés de façon imminente à des clients.

Le moteur avait été testé de façon intensive avant d'être certifié par Transports Canada. Pour obtenir cette approbation, plusieurs examens de sécurité ont été réussis.

«Poussé à ses limites»

Il faut aussi prendre en considération que l'appareil endommagé, le FTV1, est un avion qui a été conçu pour être «poussé à ses limites». Et selon la nature du problème, Bombardier pourrait ne pas avoir à reporter la date de l'entrée en service.

Enfin, s'il faut se fier à des incidents passés semblables, on constate que ce type de pépins ne signifie pas la fin pour une nouvelle gamme d'appareils, loin de là.

À ce sujet, l'analyste de GMP Securities, Deepak Kaushal, a recensé deux incidents récents. Les deux sont survenus il y a quatre ans et les deux impliquaient des moteurs fabriqués par Rolls-Royce (pour un Boeing Dreamliner 787 et un Airbus A380 du transporteur Qantas). Dans les deux cas, il s'agissait d'un incident «non confiné», c'est-à-dire que des morceaux ont été projetés hors du boîtier du moteur pour atteindre le fuselage de l'avion.

«Ce type de défaillance est très rare et ne représente que 5% des incidents liés aux moteurs, notamment parce que les moteurs sont testés de façon exhaustive pour minimiser le risque pour un appareil en vol», souligne l'analyste qui fait remarquer que, dans les deux cas, il a fallu au moins un mois pour bien cerner le problème.

Dans le cas de l'A380, l'appareil était en service et en vol quand l'incident est survenu. Deepak Kaushal souligne qu'il a fallu 18 mois pour réparer l'appareil endommagé afin qu'il puisse voler de nouveau.

Cet analyste connaît bien Bombardier puisqu'il a vendu des avions commerciaux de l'entreprise durant un peu plus de trois ans. Il était directeur des ventes lorsqu'il a quitté Bombardier Aéronautique en 2007 pour entrer chez GMP.

Selon lui, l'enquête qui se déroule sur la CSeries pourrait durer plusieurs semaines, et les essais en vol pourraient ne pas reprendre avant plusieurs mois.

L'incident arrive à un bien mauvais moment puisque le quatrième véhicule d'essai de la CSeries venait tout juste de commencer à voler et que Bombardier pouvait espérer accumuler les heures de vol à un meilleur rythme avec quatre appareils, ce qui allait assurément jouer favorablement sur le niveau de confiance des clients actuels et potentiels. De plus, lorsque la menace d'un délai se fait sentir, le risque d'annulation de commandes augmente.

Les essais en vol devront reprendre le plus rapidement possible, si Bombardier souhaite pouvoir exposer un de ses appareils le mois prochain au Salon de Farnborough. Autrement, il sera impossible d'y acheminer un appareil qui procurerait une belle vitrine promotionnelle à la CSeries.

Au final, un facteur déterminant pour Bombardier est de ne pas devoir apporter de modifications technologiques qui rendraient la CSeries moins avantageuse, moins viable et moins intéressante économiquement.