Malgré la distance, l'essor de l'industrie du pétrole et du gaz de schiste dans les Prairies a été fructueux pour Tremcar, un manufacturier québécois de remorques-citernes.

La multiplication des puits d'extraction de pétrole et de gaz de schiste a fait bondir la demande de transport par camions-citernes, tant pour les ingrédients de forage que pour les hydrocarbures extraits.

Et parce que ce matériel roulant est soumis à des normes sévères, le savoir-faire de Tremcar en tant que constructeur de remorques-citernes de haute technicité s'est retrouvé aussi en demande accrue.

Résultats: en plus de ses deux usines principales en Montérégie (Saint-Jean-sur-Richelieu et Saint-Césaire, qui regroupent 340 de ses 750 employés en tout), Tremcar compte maintenant 3 usines hors du Québec (1 à Toronto et 2 en Ohio) et 5 centres de services en Saskatchewan (2), en Alberta, en Ontario et en Ohio.

Pour une deuxième année consécutive, Tremcar prévoit livrer «entre 1300 à 1500» remorques-citernes. C'est presque 50% de plus qu'il y a 3 ans, ce qui lui vaut des revenus d'ensemble «de 175 à 180 millions de dollars».

Mais pour son principal patron et actionnaire, Jacques Tremblay, un entrepreneur connu en Montérégie, il n'est pas question d'en rester là. Il recherche des partenariats d'affaires dans le centre-sud des États-Unis, afin d'y pénétrer le marché du camionnage des produits pétrochimiques. Des négociations pourraient aboutir très bientôt, confie-t-il en entrevue au siège social de Tremcar.

Mais pourquoi cibler cette région et ce marché en particulier?

C'est qu'après avoir profité du boom pétrolier et gazier dans les Prairies, le patron de Tremcar entrevoit des occasions d'affaires dans le regain de la pétrochimie aux États-Unis.

Ce regain est suscité par l'abondance de gaz naturel à bas prix, devenue un énorme avantage comparatif dans le marché mondial de la pétrochimie. «Aux États-Unis, cette industrie s'est remise à investir des milliards pour accroître ses capacités de production», explique M. Tremblay.

«Pour nous, ce regain de la pétrochimie signifie une demande accrue de camionnage avec des remorques-citernes aux normes très spécifiques. Et ça, c'est le savoir-faire que nous avons développé chez Tremcar depuis plus de 20 ans. C'est ce qui nous a fait passer d'une PME d'une vingtaine de salariés au début des années 90 à un groupe manufacturier de 750 employés au Canada et aux États-Unis», relate-t-il fièrement lors d'une visite d'usine.

Fabrication complexe

Avec son fils Daniel, 42 ans, un économiste de formation qui est PDG, Jacques Tremblay explique les étapes de conception et de fabrication des remorques-citernes, toutes faites d'acier inoxydable et d'aluminium.

Pour les néophytes du camionnage, ces grosses citernes que l'on croise sur les routes ont l'air du pareil au même. Mais en fait, elles sont soumises à des normes strictes de fabrication selon le type de liquide transporté, des ingrédients alimentaires souvent fragiles jusqu'aux produits chimiques à risque.

Chez Tremcar, une visite d'usine démontre le niveau technique de cette fabrication, de l'arrivage des métaux en rouleaux à couper et à façonner jusqu'à l'inspection finale des remorques-citernes. Elles sont d'allure rutilante au premier regard, mais bardées de caractéristiques particulières quand on y regarde de plus près.

En fait, devant les besoins souvent très particuliers de ses clients, Tremcar doit gérer un catalogue de remorques-citernes livrables selon des dizaines de variantes possibles. En parallèle, l'entreprise doit planifier et surveiller de très près ses coûts de production. C'est une condition pour demeurer concurrentiel et rentable dans le contexte nord-américain.

«Comparé à nos usines en Ohio, par exemple, ça nous coûte 25% de plus au Québec juste avec les charges fiscales liées à l'emploi. En plus, nous devons compenser les surcoûts engendrés par les fluctuations du taux de change, de plus en plus fréquentes depuis quelques années», affirme Daniel Tremblay.

N'empêche, Tremcar tient à garder à Saint-Jean-sur-Richelieu sa principale place d'affaires de conception et de fabrication par des motifs de compétence, mais aussi de responsabilité économique dans la région.

«En tant que petite ville industrielle et commerciale, Saint-Jean a déjà subi trop de fermetures d'usines et de pertes d'emplois depuis des années», commente Jacques Tremblay.

Ces temps-ci, l'usine principale de Tremcar fonctionne à bon régime avec une grosse vingtaine de remorques en assemblage simultané, selon leur degré de complexité.

Malgré ce bon rythme d'activités, Jacques Tremblay garde un oeil vigilant sur les risques et les occasions d'affaires pour la progression de Tremcar. D'où son intérêt de conclure bientôt des partenariats d'expansion dans le centre-sud des États-Unis.

«Nous ressentons un ralentissement dans le développement pétrolier des Prairies, en attendant les projets de pipeline. Aussi, l'économie est un peu plus tiède que prévu en Ontario, au Québec et dans l'est du Canada», explique-t-il.

«Le marché américain représente encore 20% des ventes de Tremcar. Nous voulons doubler cette part à 40% d'ici deux ans grâce aux partenariats que nous sommes en train de négocier.»

-----------------

TREMCAR EN UN COUP D'OEIL

> Activités : conception et constructeur de remorques-citernes de technicité élevée en acier inoxydable et en aluminium pour le transport de produits alimentaires, chimiques et pétroliers

> Siège social : Saint-Jean-sur-Richelieu (avec d'autres usines à Saint-Césaire, à Toronto et en Ohio)

> Effectif (1) : 750 employés (environ 550 au Canada et 200 en Ohio)

> Chiffre d'affaires (1) : de 175 à 180 millions

> Actionnaires : Jacques Tremblay (président du conseil) et sa famille

(1) Pour tout le groupe Tremcar, incluant des filiales spécialisées en fabrication de composantes et en services d'entretien et de réparation de remorques-citernes.