Le transporteur aérien torontois Porter serait sur le point d'acheter 30 avions CSeries à la multinationale montréalaise Bombardier (T.BBD.B), d'après ce que rapporte mardi le quotidien américain The Wall Street Journal.

Porter Airlines devra éliminer plusieurs obstacles importants s'il veut réussir à faire décoller la CSeries de sa plaque tournante, l'aéroport Billy Bishop, dans l'île de Toronto.

La piste d'atterrissage est un peu courte et les sociétés aériennes n'ont pas le droit d'y exploiter des avions à réaction.

Porter Airlines doit annoncer ce matin à Toronto un projet d'expansion. La société aérienne n'a pas voulu donner davantage de détails. Or, le Wall Street Journal a rapporté lundi soir que Porter allait annoncer une commande ferme pour 12 appareils CS100, le plus petit appareil de la nouvelle famille de Bombardier, assortie d'options pour 18 appareils supplémentaires.

Selon le Wall Street Journal, Porter Airlines serait le mystérieux transporteur qui a signé une lettre d'intention avec Bombardier en décembre dernier pour l'acquisition d'une trentaine d'appareils. Dans un communiqué de presse, Bombardier avait alors simplement indiqué qu'il s'agissait d'un «transporteur dans les Amériques».

Si Porter Airlines se révèle être ce transporteur anonyme, il s'agira d'un premier client canadien pour la CSeries. À ce jour, Porter n'exploite que des Q400, des appareils turbopropulsés de Bombardier.

Le grand patron de Bombardier, Pierre Beaudoin, s'est fait avare de commentaires, hier, alors qu'il rencontrait les journalistes après avoir prononcé un discours devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).

«À ce que je sache, selon les règlements de la Ville, seuls les turbopropulseurs ont le droit d'atterrir à Billy Bishop, a-t-il déclaré. C'est pour cela que notre Q400 a beaucoup de succès à cet aéroport.»

Porter pourrait toujours essayer de faire changer cette réglementation en faisant valoir que la CSeries n'est pas vraiment plus bruyante que les Q400.

L'analyste Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, croit toutefois que Porter suscitera une forte opposition si elle essaie de faire atterrir des avions à réaction à Billy Bishop.

«Il n'y a aucune garantie que le transporteur réussira à exploiter le CS100 de sa plaque tournante principale», a-t-il écrit dans une note d'analyse.

À 1200 mètres, la piste d'atterrissage de Billy Bishop est un peu courte: le CS100 peut y atterrir ou y décoller, mais il doit limiter son poids, donc la quantité de carburant à bord, ce qui a un impact sur son rayon d'action.

M. Doerksen estime toutefois que Porter réussirait quand même à effectuer des liaisons directes avec Winnipeg, Halifax et la Floride.

Il s'agit là, selon lui, de possibilités intéressantes. Toutefois, si Porter n'utilise pas la CSeries à partir de Billy Bishop, l'acquisition a beaucoup moins d'avantages.

«Nous pensons que toute tentative de Porter pour étendre ses activités dans l'Ouest canadien amènerait Air Canada et WestJet à répliquer de façon agressive, a-t-il écrit. Ces deux transporteurs sont beaucoup plus gros, ont des réseaux plus étendus et sont mieux capitalisés.»

L'analyste a également indiqué que Porter aura besoin d'une infusion de capital pour procéder à cette acquisition, évaluée à 870 millions de dollars pour les 12 commandes fermes.

------------------

AIR CANADA CLIENT POTENTIEL

Bombardier lorgne un autre client canadien, Air Canada, qui étudie présentement le renouvellement de sa flotte d'avions à fuselage étroit. Le transporteur examine toute la catégorie des appareils de 75 à 160 places, ce qui inclut la CSeries de Bombardier ainsi que les appareils de Boeing et d'Airbus.

«Je crois que le focus principal, c'est la CSeries, un avion qui est parfait pour Air Canada, a déclaré Pierre Beaudoin, grand patron de Bombardier, hier. Maintenant, il s'agit d'être compétitif lorsque viendra le temps de soumissionner. Mais nous ne sommes pas encore à cette étape.» M. Beaudoin a insisté sur l'importance des nouveaux marchés pour l'ensemble de son entreprise. L'Asie représente maintenant plus de 25% du chiffre d'affaires de Bombardier. M. Beaudoin a invité les gouvernements à adapter leurs programmes à ces nouvelles réalités. «Ce qu'on recherche, entre autres: faciliter l'investissement à l'étranger ainsi que les partenariats internationaux en recherche et développement», a-t-il déclaré.

------------------

LA CSERIES EN UN COUP D'OEIL

- Environ 47 millions US: Prix affiché de l'avion

- 20% moins gourmand en carburant qu'un avion équivalent en service

- 148 Commandes fermes à ce jour

- 0 Livraison

- Rôle: avion commercial

- Nombre de places: de 110 à 135

- Premier vol: prévu pour juin 2013

- Mise en service: prévue à la mi-2014 (CS100), à la fin de 2014 (CS300)