Le conflit de travail à l'usine de Bombardier Transport de La Pocatière, dans le Bas-Saint-Laurent, pourrait durer encore longtemps.

Bombardier [[|ticker sym='T.BBD.B'|]] s'est dit prêt jeudi à vivre une longue grève après que ses syndiqués, affiliés à la CSN, aient rejeté dans une proportion de 89,6 pour cent son offre de la semaine dernière, que l'entreprise avait qualifiée de finale.

Les résultats de l'assemblée générale spéciale des syndiqués, tenue mercredi, ont été rendus publics très tôt jeudi matin.

«Nous avons ce qu'il faut pour continuer à fonctionner pendant un bon bout de temps», a commenté jeudi un porte-parole de Bombardier Transport, Marc Laforge, au cours d'un entretien téléphonique, en faisant référence au «plan de contingence» de l'entreprise.

Le président du syndicat des employés de La Pocatière, Mario Lévesque, a déploré cette sortie de Bombardier, la jugeant peu constructive.

Pour l'instant, a toutefois assuré M. Laforge, il n'est pas prévu de transférer la production de La Pocatière dans les autres usines nord-américaines de Bombardier Transport, qui sont situées à Thunder Bay, Kingston, Plattsburgh et Sahagun (Mexique).

Au moment du déclenchement de la grève, le 1er novembre, l'usine de La Pocatière fabriquait des composants pour des voitures destinées à Toronto, à Chicago, au Maryland et au New Jersey. Les stocks accumulés au cours des derniers mois font en sorte que les livraisons aux clients ne seront pas retardées, du moins pour l'avenir prévisible, a indiqué le porte-parole.

Pour ce qui est des nouvelles voitures du métro de Montréal, leur production ne doit débuter que l'été prochain. À l'heure actuelle, Bombardier et son partenaire Alstom sont à construire des voitures-test.

Les quelque 330 employés syndiqués de Bombardier à La Pocatière sont sans contrat de travail depuis le 30 septembre 2011. Le 27 octobre, ils avaient voté en faveur d'un débrayage dans une proportion de 95,5 pour cent.

Marc Laforge a précisé jeudi que la dernière offre patronale prévoyait des hausses salariales totalisant 12,5 pour cent sur cinq ans ainsi qu'une bonification de 18 pour cent des prestations du régime de retraite grâce à une injection de 9 millions $ de l'employeur.

Sous-traitance

Bombardier s'est par ailleurs engagé à investir 3 millions $ dans l'usine afin d'acquérir de l'équipement dernier cri qui permettrait notamment d'effectuer du soudage au laser et, par conséquent, de fabriquer à La Pocatière les toits en aluminium des nouvelles voitures du métro de Montréal.

Le rapatriement à l'interne de ce travail, qui devait être envoyé en sous-traitance aux États-Unis, représente entre 10 et 15 emplois de plus à La Pocatière, selon l'entreprise.

Par contre, Bombardier refuse d'investir dans du nouvel équipement pour découper et percer l'«acier noir», jugeant qu'il s'agit de tâches à faible valeur ajoutée qui peuvent être exécutées en sous-traitance à moindre coût.

Cette décision entraînerait la suppression d'une dizaine d'emplois, mais en tenant compte des postes créés avec le rapatriement du soudage au laser, la sous-traitance n'aurait pas d'impact sur la main-d'oeuvre syndiquée à La Pocatière, d'après Bombardier.

«Ils (les syndiqués) disent que la sous-traitance, c'est la fin du monde, mais ce n'est pas le cas, a martelé M. Laforge. La sous-traitance a toujours existé dans l'industrie de la fabrication et il en sera toujours ainsi.»

L'entreprise a par ailleurs tenu à souligner que des sous-traitants avec qui elle fait affaire comptent parmi leurs employés des syndiqués CSN.

Or, le syndicat ne digère toujours pas le fait que le contrat du métro de Montréal ne fera travailler que 200 employés à La Pocatière alors qu'au moment de l'annonce officielle, le gouvernement avait évoqué 700 postes.

Des pièces qui étaient auparavant fabriquées à La Pocatière le sont désormais dans d'autres usines de Bombardier, dénonce le syndicat.

En 2010, après avoir vu des tâches et des machines être transférées aux États-Unis dans le cadre du contrat du métro de Chicago, le syndicat avait conclu avec Bombardier une lettre d'entente. Selon M. Lévesque, celle-ci stipule qu'en plus de l'assemblage des caisses, l'usine de La Pocatière sera responsable de la fabrication des pièces primaires et des sous-ensembles pour les voitures du métro de Montréal.

Bombardier rétorque que le syndicat fait une mauvaise interprétation de la lettre d'entente.

Offre «très généreuse»

Malgré le vote sans équivoque de ses syndiqués, Bombardier n'entend donc pas modifier substantiellement sa proposition.

«Nous avons déposé une offre qui est très généreuse, alors si les syndiqués veulent une entente, cela devra se faire à l'intérieur du cadre qui est sur la table actuellement», a insisté Marc Laforge, en se demandant si le syndicat ne cherche pas simplement «à en obtenir davantage».

Rappelons que plus tôt cette semaine, Bombardier a obtenu de la Cour supérieure une injonction qui limite à 25 le nombre de grévistes qui peuvent manifester aux deux entrées de l'usine de La Pocatière. Quelque 200 employés non syndiqués y travaillent.

L'action de Bombardier a clôturé à 3,07 $ jeudi, en hausse d'un pour cent, à la Bourse de Toronto.