Le sort d'un concurrent de Bombardier Avions d'affaires est plus incertain que jamais.

Aux prises avec de graves difficultés financières, Hawker Beechcraft a cru que son salut proviendrait d'un acquéreur chinois, Superior Aviation. Mais il est loin d'être certain que la transaction aura lieu.

Hawker Beechcraft, qui produit des appareils turbopropulsés et des biréacteurs, est le cinquième constructeur mondial d'avions d'affaires. En mars 2007, la société torontoise Onex Corporation et Goldman Sachs ont versé environ 500 millions US chacune pour prendre le contrôle de l'avionneur, dans le cadre d'une transaction de 3,3 milliards US.

L'investissement n'a pas donné les fruits attendus. La récession de 2008-2009 a fait mal et Hawker Beechcraft n'a jamais réussi à remonter la pente. En mai dernier, avec une dette de 2,5 milliards US, l'entreprise de Wichita s'est placée sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites.

En juillet, la société chinoise Superior Aviation Beijing a déposé une offre de 1,79 milliard US pour faire l'acquisition de la division civile d'Hawker Beechcraft. Sa division militaire, qui fabrique notamment des appareils d'entraînement, n'était pas visée.

Superior Aviation est détenue à 60% par un couple chinois et à 40% par le gouvernement municipal de Pékin.

L'analyste américain Richard Aboulafia, de la firme Teal Group, s'est toutefois interrogé sur cette entreprise, peu connue des observateurs. Dans le passé, Superior Aviation a acheté des entreprises américaines en difficultés financières, mais il s'agissait de sociétés beaucoup plus petites qu'Hawker Beechraft. Superior Aviation a ainsi acquis un petit constructeur d'hélicoptères du Texas, Brantly, mais a transféré toute sa production en Chine. Superior a également acquis un fabricant de pièces de moteurs d'avion, Superior Air Parts, en 2010.

«C'est un petit groupe de gens qui a peut-être accès à des liquidités, mais je soupçonne que non», a indiqué M. Aboulafia.

Selon Brian Foley, un analyste spécialisé dans l'industrie de l'aviation d'affaires, certains indices laissent présager une conclusion positive de la transaction, alors que d'autres experts estiment que ce sera un échec.

Il a notamment souligné un signe encourageant: le fait que Superior Aviation vient d'engager un lobbyiste pour l'aider à conclure la transaction.

«Ça nous porte à croire qu'ils font ce qui est nécessaire», a-t-il noté lors d'une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires.

D'autres signes sont moins prometteurs, selon M. Foley. Au début du mois de juillet, Hawker Beechcraft avait fait savoir qu'elle entamait des négociations exclusives avec Superior Aviation pendant une période de 45 jours.

«Cette échéance est maintenant passée et on n'a rien annoncé», a-t-il rappelé.

Il a ajouté qu'Hawker Beechcraft avait demandé et obtenu une prolongation de la protection offerte par le chapitre 11.

«Cela peut signifier que Superior Aviation n'est plus dans le paysage et qu'ils ont besoin de plus de temps pour se réorganiser», a avancé l'analyste.

Des concurrents, Cessna et Embraer, ont déjà fait savoir qu'ils pourraient être intéressés par l'acquisition de certains actifs d'Hawker Beechcraft. Ce n'est cependant pas le cas de Bombardier.

«Nous nous concentrons sur nos produits en développement et sur l'amélioration de nos produits existants», a déclaré la porte-parole de Bombardier Avions d'affaires, Danielle Boudreau, à La Presse Affaires.

M. Foley a déclaré que le délai demandé par Hawker Beechcraft pourrait également signifier que Superior Aviation est toujours à bord et qu'elle a besoin de plus de temps pour conclure la transaction.

Si Superior Aviation va de l'avant, cela pourrait donner un avantage à l'avionneur sur le marché chinois. M. Foley a toutefois rappelé que ce marché est encore bien petit.

«Il y a plus de 19 000 biréacteurs d'affaires dans le monde, a-t-il indiqué. Il n'y en a qu'un peu plus de 200 en Chine. Nous prévoyons que ce marché va augmenter de 400% en 10 ans, mais ça ne fera que 800 appareils.»

Bombardier ne s'inquiète pas.

«Notre part de marché est de plus de 30% en Chine», a fait valoir Mme Boudreau.

Selon M. Foley, un échec de la transaction et la disparition d'Hawker Beechcraft n'auraient pas un effet majeur sur le marché mondial.

«Il y a déjà trop de capacité, a-t-il expliqué. Tous les concurrents ne feraient que partager quelques points de pourcentage.»

Chose certaine, l'incertitude actuelle nuit à Hawker Beechcraft et favorise ses concurrents. Les acheteurs intéressés par un appareil d'Hawker Beechcraft voudraient être certains qu'il y aura encore une entreprise pour leur fournir des pièces et du service après-vente, selon l'analyste.

«Ils vont plutôt regarder du côté d'Embraer, de Cessna ou de Bombardier», a-t-il affirmé.