Le gouvernement Harper n'adoptera aucun plan de sauvetage pour rescaper Aveos, a-t-il annoncé hier, au moment où des travailleurs licenciés par le sous-traitant d'Air Canada manifestaient à Ottawa.

Plusieurs dizaines de travailleurs se sont rassemblés devant le parlement, en matinée, scandant des slogans comme «Harper, menteur!» Ils exigent que le gouvernement fédéral intervienne pour sauver les 2600 emplois éliminés à Montréal, Toronto et Winnipeg par la fermeture d'Aveos.

Le ministre des Transports, Denis Lebel, a été clair: la fermeture d'Aveos est une décision d'affaires privée et il n'entend pas voler au secours de l'entreprise, qui s'est placée à l'abri de ses créanciers la semaine dernière.

«Nous n'envisageons aucun plan de sauvetage pour Aveos et Air Canada», a déclaré le ministre aux Communes.

Ottawa a refusé de se mêler de la fermeture d'Aveos jusqu'ici, bien que M. Lebel reconnaisse que la loi oblige Air Canada à entretenir ses avions dans trois villes canadiennes, dont Montréal.

Selon les travailleurs et les partis de l'opposition, la fermeture d'Aveos place donc Air Canada en contravention avec la loi qui a encadré la privatisation du transporteur aérien dans les années 80. Jusqu'ici, M. Lebel n'a pu dire si c'est effectivement le cas.

«Il a l'obligation de nous dire si, oui ou non, il va faire respecter la loi», a affirmé le chef néo-démocrate Thomas Mulcair.

«Le gouvernement du Canada a décidé de privatiser l'entreprise mais avec des garanties spécifiques et des garanties qui n'ont pas été respectées par la société», a renchéri le chef libéral Bob Rae.

Le ministre Lebel produira demain une analyse juridique sur la fermeture d'Aveos, a-t-il fait savoir en matinée devant un comité parlementaire. Mais ce développement n'a guère rassuré les dizaines de travailleurs. Ils craignent que le gouvernement Harper cherche en fait à modifier la loi et à permettre à Air Canada d'entretenir ses avions où bon lui semble.

«Ça me fait peur, a confié le porte-parole du syndicat, Jean Poirier. Dans deux jours, M. Lebel va sortir des avis juridiques pour modifier cette loi.»

Les partis de l'opposition, eux, ont pris bonne note du fait que l'analyse juridique sera présentée le même jour que le budget fédéral, alors que la très grande majorité des journalistes seront enfermés dans un huis clos.

«Ils veulent faire diversion, a dénoncé le député libéral Denis Coderre. C'est de la poussière en-dessous du tapis. Ils veulent camoufler cette affaire pour qu'on passe à autre chose.»

Réactions à Québec

Pour sauver les emplois menacés à Aveos, Québec devrait offrir une garantie de prêt ou participer au capital-actions de son client Air Canada, propose pour sa part François Legault.

Le premier ministre Jean Charest a rappelé hier qu'il étudie «actuellement les possibilités de recours judiciaire». La chef du PQ, Pauline Marois, a pressé M. Charest d'entamer un recours juridique contre Air Canada. «Le ministre Lebel n'a pas fermé la porte à la réduction des obligations légales d'Air Canada. [...] Ça veut dire que le gouvernement fédéral pourrait rendre légal ce qui est présentement illégal et permettant à Air Canada, évidemment, de quitter le Québec», s'est-elle inquiétée.

- Avec la collaboration d'Anabelle Nicoud et Paul Journet