En 2004, après sa quasi-faillite, Air Canada a créé une entreprise afin de se renflouer en vendant des actifs, dont les services d'entretien d'avions devenus Aveos. Aujourd'hui, cette entreprise, Gestion ACE Aviation, prépare un boni de près de 300 millions au bénéfice de ses actionnaires.

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Ce boni fait partie des décisions de fin d'entreprise qui leur seront soumises lors de la dernière assemblée, le 25 avril prochain, au Musée des beaux-arts de Montréal.

Le versement de ce boni final de plus d'un quart de milliard de dollars est prévu «dans les semaines suivant l'assemblée», lit-on dans le document préparatoire de convocation envoyé aux actionnaires au début du mois.

C'était avant que l'entreprise Aveos - ex-filiale d'ACE Aviation alors nommée ACTS pour «Air Canada Technical Services» - annonce la fin soudaine de ses activités au Canada. Cette fermeture a provoqué la perte de 1800 emplois à la base d'entretien principale à Montréal.

Depuis cette fin soudaine, que les dirigeants d'Aveos attribuent à la perte de contrats d'entretien d'Air Canada, les représentants syndicaux des travailleurs licenciés réclament l'intervention des gouvernements pour forcer une relance de leur employeur avec le transporteur.

Ils estiment que la fin d'Aveos et la perte de ces centaines d'emplois sont les conséquences du délestage des services d'entretien d'avions effectué par Air Canada et ACE Aviation il y a quelques années.

300 millions promis

À ce titre, d'ailleurs, un examen détaillé des documents d'ACE Aviation révèle que le boni de près de 300 millions promis à ses actionnaires représente la dernière étape des transferts de valeur en actions et en comptant qui ont totalisé plus de 4 milliards de dollars au fil des ans.

Cette cagnotte considérable comprend deux éléments principaux.

D'une part, on y retrouve pour 2 milliards de dollars en rachats d'actions d'ACE Aviation qui ont été payés au comptant aux actionnaires.

D'autre part, 2 milliards supplémentaires représentent la valeur remise aux actionnaires d'ACE lors des distributions de parts des fiducies de revenu qui avaient été mises en Bourse avec des filiales d'Air Canada: la firme de points boni Aéroplan et le transporteur régional Jazz.

Quant aux services d'entretien d'avions, l'examen des documents d'ACE Aviation révèle qu'elle avait encaissé 763 millions au comptant lors de la vente de 70% du capital-actions de sa filiale ACTS à des investisseurs externes, à la fin de 2007.

Cette somme a garni des réserves financières alors considérables chez ACE Aviation, et dont elle a pu se servir ensuite pour payer les rachats d'actions effectués à coups de centaines de millions de dollars parmi ses actionnaires.

La somme de près de 300 millions dont la distribution aux actionnaires sera votée au cours de leur dernière assemblée, dans un mois à Montréal, constitue la part restante de cette grosse réserve de liquidités.

Les adieux à Milton

C'est aussi au cours de cette assemblée que le principal architecte de la restructuration d'Air Canada, Robert Milton, fera un dernier tour de piste à titre de président du conseil et chef de la direction d'ACE Aviation.

Il quittera aussi l'entreprise avec une petite fortune personnelle. Sa rémunération en salaires et primes totalise quelque 52 millions de dollars depuis 2006, selon un relevé des documents officiels d'ACE Aviation.

On y constate aussi que l'un des membres de longue date du conseil d'administration d'ACE Aviation n'est nul autre qu'un ex-premier ministre du Québec, Pierre Marc Johnson.

Retourné en droit des affaires après avoir quitté la politique, M. Johnson siège au conseil d'ACE Aviation depuis sa création à l'automne 2004.

VALEUR DES GAINS EN ARGENT ET EN ACTIONS RÉALISÉS PAR LES ACTIONNAIRES À LA SUITE DE TRANSACTIONS IMPLIQUANT:

AIR CANADA : 488 MILLIONS

AÉROPLAN : 3 MILLIARDS

JAZZ AIR : 758 MILLIONS

ACTS/AVEOS : 763 MILLIONS