Les velléités protectionnistes se multiplient aux États-Unis. Et la dernière proposition en date pourrait faire mal aux ports canadiens, dont le port de Montréal.

Le président de la U.S. Federal Maritime Commission, Richard Lidinsky, a indiqué récemment que son organisme entreprendrait un examen des mesures qui devraient être prises pour donner un coup de pouce à l'industrie du cargo aux États-Unis, qui n'arrive pas à concurrencer l'industrie canadienne.

Nouveaux tarifs

Parmi les mesures envisagées, il y a l'imposition de nouveaux tarifs pour les marchandises en provenance de l'Asie qui transitent par les ports canadiens avant d'entrer aux États-Unis et l'imposition de nouvelles mesures d'inspection des conteneurs à destination des États-Unis, ce qui pourrait entraîner des coûts importants pour l'industrie canadienne.

La U.S. Federal Maritime Commission veut aussi évaluer si le transport ferroviaire de marchandises au Canada bénéficie d'une quelconque aide gouvernementale. La commission américaine tiendra des audiences sur cette importante question dès demain à Washington.

M. Lidinsky a expliqué les intentions de son organisme il y a deux semaines à Montréal à l'occasion d'une conférence sur le transport maritime au Canada.

Ce dernier dit avoir reçu une lettre de deux sénateurs démocrates de l'État de Washington lui demandant de faire un tel examen. Les sénateurs Parry Murray et Maria Cantwell ont exprimé leurs inquiétudes de voir le port de Prince-Rupert, en Colombie-Britannique, accaparer une part grandissante du transport de marchandises en provenance de l'Asie qui aboutissent sur le marché américain.

«Il est impératif que l'on permette à tous les ports de jouer selon des règles équitables pour que les États-Unis puissent continuer à avoir une industrie du cargo concurrentielle», ont écrit les sénateurs au président Lidinsky.

Le West Coast Collabora-tive, qui regroupe les ports et les lignes de chemin de fer de la Côte Ouest, réclame l'imposition d'une taxe d'amélioration des ports à tous les conteneurs qui entrent aux États-Unis à partir du Canada. L'argent provenant de cette taxe, environ 143$ par conteneur, pourrait servir à revitaliser les ports américains.

Le président de la Chambre de commerce du Canada, Perrin Beatty, s'inquiète vivement des retombées de cet élan protectionniste au sud de la frontière. Le gouvernement Harper doit déjà mener une bataille auprès des autorités américaines pour éliminer dans le prochain plan de relance de 447 milliards US la clause dite Buy America qui pénalise les entreprises canadiennes.

«Il faut contrer cette proposition avant qu'elle ne soit adoptée. Car cette mesure aura des effets négatifs importants sur tous les ports canadiens, y compris le port de Montréal», a indiqué à La Presse Perrin Beatty.

M. Beatty a expédié une lettre au ministre du Commerce international, Ed Fast, dans laquelle il lui demande de mettre en oeuvre tous les efforts pour tuer dans l'oeuf cette proposition.

«Cet enjeu nous préoccupe au plus haut point, non seulement parce que cela aura un impact sur les entreprises canadiennes et leurs clients, mais aussi parce que cette mesure protectionniste survient au moment même où nos deux gouvernements tentent d'augmenter leur coopération dans le domaine de l'économie et de la sécurité», a écrit M. Beatty.

M. Beatty a envoyé une copie de cette lettre à l'ambassadeur du Canada aux États-Unis, Gary Doer, et à l'ambassadeur américain en poste à Ottawa, David Jacobson.

De passage à Jakarta, en Indonésie, le ministre Ed Fast a affirmé avoir pris connaissance des propos de Richard Lidinsky . «Nous sommes en train d'analyser cette situation de très près. Nous ne savons pas encore si cet examen aura lieu et s'il y aura des suites. Alors, il serait prématuré de spéculer sur les conséquences de cette mesure», a-t-il dit.

Les gouvernements fédéral et provincial de la Colombie-Britannique ont investi quelque 3,5 milliards de dollars pour moderniser les ports de Prince-Rupert et de Vancouver et les liens ferroviaires de la province dans le cadre de l'initiative de la porte et du corridor de l'Asie-Pacifique.