Déjà bien présent dans le domaine des ressources naturelles au Québec, le fabricant d'hélicoptères Eurocopter veut prendre d'assaut le secteur policier de la province. Même si, pour cela, il doit se battre contre l'enfant du pays, Bell Helicopter.

«Nous aimons la bagarre», lance le président-directeur général d'Eurocopter Canada, Guy Joannes, dans une entrevue avec La Presse Affaires.

Alors que Bell Helicopter Textron Canada conçoit et assemble des hélicoptères au Québec, à Mirabel, Eurocopter Canada est établie à Fort Erie, en Ontario, où elle effectue des travaux d'ingénierie, de finition et de fabrication de pièces en matériaux composites. Mais elle n'assemble pas d'hélicoptères au complet. Eurocopter emploie environ 200 personnes au Canada, dont moins d'une dizaine au Québec. Mais selon M. Joannes, elle contribue quand même au tissu industriel du Québec.

«Le Québec est un centre aéronautique fort, nous y avons beaucoup de fournisseurs», explique-t-il.

Eurocopter fait notamment affaire avec Pratt&Whitney Canada, CAE, CMC Électronique et Plastique JW, de Trois-Rivières.

«Nous avons le sentiment de faire partie de la même équipe», déclare M. Joannes.

En dépit de la présence manufacturière de Bell Helicopter au Québec, Eurocopter fait des malheurs au chapitre des ventes. À l'heure actuelle, environ 53% des hélicoptères à turbine qui volent au Québec sont des appareils Eurocopter et environ 38% sont des appareils Bell. Les hélicoptères d'Eurocopter sont particulièrement appréciés dans le domaine des ressources naturelles, qu'il s'agisse de l'industrie minière, de l'industrie forestière ou d'Hydro-Québec.

«Nous sommes très près des clients, affirme M. Joannes. Nos produits sont également très attrayants, notamment en raison des coûts d'acquisition et des coûts d'exploitation.»

Secteur policier

Eurocopter n'a cependant pas eu le même succès du côté du secteur policier. Les trois appareils de la Sûreté du Québec sont des hélicoptères de Bell. Quant aux forces policières des municipalités québécoises, elles ne possèdent aucun hélicoptère.

M. Joannes se dit cependant persuadé de voir des appareils Eurocopter voler au-dessus de Montréal et de Québec au cours des prochaines années. Il souligne que 18 des 22 hélicoptères utilisés pour des missions policières au Canada sont des appareils Eurocopter. La Gendarmerie royale du Canada fait entièrement confiance aux hélicoptères d'Eurocopter, avec 10 appareils. Des villes comme Edmonton, Calgary, Winnipeg et York ont leurs propres hélicoptères.

«Au cours des cinq prochaines années, nous espérons voir des municipalités du Québec se décider à prendre nos produits, indique-t-il. Et les hélicoptères de la SQ sont vieux. Si elle veut nous faire confiance, nous sommes prêts à les aider.»

Le marché des services ambulanciers reste également à développer au Québec, alors que l'Ontario peut compter sur un important service d'hélicoptères-ambulances, soit une vingtaine d'appareils Sikorsky et Agusta-Westland.

«Avec ce que j'ai vu en Europe et en Australie, je crois qu'à plus ou moins long terme, les gens vont commencer à réclamer davantage de services médicaux aériens, soutient M. Joannes. Dans le monde, l'hélicoptère a prouvé sa capacité de sauver des vies.

Eurocopter s'était installée à Fort Erie en 1984, sous le nom MBB Helicopter Canada, après avoir obtenu un contrat pour la fourniture d'hélicoptères à la garde côtière canadienne.

«Il y avait des engagements réciproques», déclare M. Joannes.

Défense

La filiale canadienne a investi au cours des années et a obtenu divers contrats de modification et de recherche et développement de la part du gouvernement canadien. Maintenant, Eurocopter lorgne le contrat de remplacement des hélicoptères Griffon CH-146 de la Défense nationale, en service depuis 1995.

«Si la Défense nationale voulait nous confier le remplacement des Griffon, nous pourrions réfléchir et investir au Québec, avance-t-il. La stratégie d'Eurocopter, ce n'est pas de venir dans un pays, obtenir un contrat et de repartir. Nous sommes en permanence en train d'investir.»

Il note qu'Eurocopter fait partie du géant EADS qui emploie maintenant 1600 personnes au Canada. EADS vient d'acquérir Vector Aerospace, qui se spécialise dans la maintenance d'avions et d'hélicoptères. Vector a des installations dans plusieurs provinces canadiennes, mais pas au Québec. Cette situation pourrait cependant changer. «Il y a peut-être quelque chose à faire dans l'avenir, mais il est trop tôt pour en parler, laisse-t-il tomber. Nous n'en resterons pas là.»