Nouvelle salve dans la guerre juridique que livrent des entreprises d'aviation à la direction de l'aéroport de Saint-Hubert. Un transporteur aérien menace de s'adresser aux tribunaux pour faire annuler une série de transactions immobilières conclues par l'administration, dont certaines ont fait l'objet d'un rapport dévastateur de la firme de vérification KPMG.

La société Pascan, qui exploite une flotte d'une vingtaine d'avions, a expédié cette semaine une mise en demeure aux administrateurs de DASH-L, l'organisme à but non lucratif qui administre l'aéroport. Elle les somme de prendre tous les moyens nécessaires pour annuler l'acquisition d'un immeuble qui doit bientôt être transformé en aérogare ainsi que la vente de terrains à la Ville de Longueuil.

Si DASH-L ne s'exécute pas dans les 10 jours, Pascan menace de s'adresser elle-même aux tribunaux pour faire dérailler la transaction.

En 2009, DASH-L s'est associée à une entreprise privée, la Corporation DEV-YHU, pour former la société Aérocentre YHU Longueuil. Le partenariat avait pour mission de doter l'aéroport d'un terminal. Pour ce faire, DASH-L a acquis l'immeuble de DEV-YHU pour 3 millions. La transaction comportait deux volets: 1,75 million pour le terrain et le bâtiment, ainsi que 1,25 million pour les frais d'honoraires relatifs à la conception du projet d'aérogare.

Un rapport de vérification de la firme KPMG, récemment déposé en Cour supérieure, a soulevé de sérieuses questions sur cette transaction. En outre, la moitié de la somme de 1,25 million a servi à payer le salaire, les frais de déplacement et de télécommunication des dirigeants de DEV-YHU, dont l'un est ensuite devenu membre du conseil d'administration de DASH-L. En fait, précise le rapport, à peine 16% de la somme a effectivement servi à payer des honoraires externes pour la conception de l'aérogare.

Les vérificateurs de KPMG soulignent que pour financer l'acquisition, DASH-L a vendu 85 hectares de terrains situés à l'aéroport à la Ville de Longueuil sans déployer de grands efforts pour en maximiser la valeur.

Depuis lors, DASH-L a signé un bail emphytéotique avec l'Aérocentre YHU Longueuil. À la demande de l'agglomération de Longueuil, l'organisme est en voie de se retirer du partenariat afin de laisser des investisseurs privés piloter le projet d'aérogare.

»Gaspillage»

Pascan, qui est à couteaux tirés avec la direction de DASH-L depuis des années, souhaite carrément faire annuler la totalité de ces transactions. Elle estime qu'elles constituent un «gaspillage pure [sic] et simple des ressources de DASH-L».

L'entreprise estime par ailleurs que DASH-L a contrevenu à ses propres lettres patentes en acquérant et en vendant des terrains sans obtenir le feu vert de ses membres à l'occasion d'une assemblée extraordinaire. Elle a produit un avis juridique qui appuie sa prétention.

Pascan n'en est pas à ses premiers démêlés juridiques avec la direction de l'aéroport, loin de là. Ses deux dirigeants, Denis Charest et Serge Charron, sont déjà impliqués dans trois poursuites contre DASH-L. La première, qui est actuellement devant la Cour d'appel, vise à bloquer un règlement qui aurait limité les heures de décollage et d'atterrissage à l'aéroport pour limiter le problème du bruit. La deuxième vise à empêcher une réforme administrative qui pourrait limiter l'influence des entreprises d'aviation dans la gestion de DASH-L. La troisième vise à forcer la direction à prolonger un bail qui permettra à une société soeur d'agrandir ses hangars.

Le directeur général de DASH-L, Pierre-Hugues Miller, a préféré ne pas commenter le dossier, hier, tout comme les représentants de Pascan.