Le couloir Québec-Windsor et le couloir Montréal-New York sont des emplacements idéaux pour l'implantation de trains à grande vitesse. Mais il faut un ingrédient essentiel pour que cette idée devienne réalité: le courage politique.

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C'est ce qu'a affirmé l'un des plus grands défenseurs du train à haute vitesse aux États-Unis, Rod Diridon, dans un discours prononcé devant l'Association québécoise du transport et des routes (AQTR) hier à Montréal.

Pendant 10 ans, M. Diridon a siégé au conseil d'administration du California High Speed Rail Authority. Il est présentement directeur général du Mineta Transportation Institute, institut de recherche financé par le gouvernement américain et le secteur privé.

«Ça prend du courage politique, parce que les gens vous traitent de fou», a-t-il lancé.

Il a recommandé de faire participer la population à toutes les étapes d'un projet de train à grande vitesse. «Il ne s'agit pas de faire de la propagande, mais de communiquer toute l'information dès qu'elle est disponible, qu'il s'agisse d'information positive ou négative, a-t-il déclaré. Il faut faire des audiences publiques.»

Il a affirmé que ce processus avait été couronné de succès en Californie. «Ça a pris du temps, mais nous avons amené la population avec nous.»

Il a rappelé qu'un projet de train à grande vitesse pouvait prendre 20 ans à se réaliser. «Si vous voulez quelque chose comme ça dans 20 ans, il faut agir dès maintenant», a-t-il lancé à son auditoire.

Il a recommandé d'isoler le projet du processus politique, et donc des changements de gouvernement au cours des années, en créant un organisme indépendant comprenant des représentants des diverses provinces et des divers États participants.

Selon lui, la vallée du Saint-Laurent constitue un couloir idéal pour la grande vitesse notamment, parce qu'il y a déjà une assise ferroviaire, parce que la population connaît une croissance et parce que la vallée constitue un accès privilégié à l'État de New York. Il a aussi noté en entrevue que les villes importantes le long du couloir étaient souvent situées à une distance idéale les unes des autres, soit entre 130 kilomètres et 160 kilomètres. Il a ajouté que le Canada est un pays riche en électricité, ce qui constitue un autre avantage.

Dans son discours, M. Diridon a insisté sur les avantages environnementaux du transport ferroviaire à haute vitesse, notamment parce qu'il devrait réduire l'utilisation de l'automobile et la fréquence des courtes liaisons aériennes, particulièrement polluantes. Il a aussi fait valoir le nombre d'emplois que de tels projets peuvent créer. En Californie, le projet de train à grande vitesse devrait créer 160 000 emplois, dans un État où le taux de chômage atteint 30% pour les travailleurs de la construction.

«C'est comme donner un verre d'eau fraîche à une personne perdue dans le désert», a-t-il déclaré.

Il a finalement soutenu que la plupart des trains à grande vitesse dans le monde font des profits. Plusieurs ont d'ailleurs été privatisés. Seuls de rares projets ne sont pas rentables, et c'est parce qu'ils ont été mal conçus, a-t-il affirmé. Il a donné l'exemple de Taiwan, qui a installé les gares de son train à grande vitesse en périphérie des grandes villes, et non pas au centre-ville. «Les environs des gares commencent maintenant à se densifier, le problème est donc en train de se résorber, mais ils ont pris un mauvais départ», a-t-il soutenu.

Il a rappelé que plusieurs pays avaient d'abord craint le concept du train à grande vitesse, mais qu'ils avaient été conquis en voyant le succès des premiers trains en France et au Japon.

«C'est ce qui va arriver en Amérique du Nord, a-t-il prédit. Dès qu'il y aura un train à grande vitesse, les gens diront: «Wow, j'en veux un!»»