Armés d'une nouvelle étude, les quatre principaux transporteurs aériens canadiens repartent à l'assaut des taxes et frais divers imposés par les gouvernements.

Selon le document, intitulé «Les impacts économiques des transporteurs membres du Conseil national des lignes aériennes du Canada», l'abolition des frais les plus problématiques aurait des effets bénéfiques sur l'ensemble de l'économie canadienne. De 3,0 à 3,7 millions de passagers de plus transiteraient par les principaux aéroports canadiens, ce qui entraînerait une augmentation de 479 millions, à 2,2 milliards de dollars, du produit intérieur brut (PIB) et la création de milliers d'emplois.

«Les politiques actuelles du gouvernement, à court terme, ça génère des revenus pour le fisc, mais, à long terme, ça coûte de l'argent à tout le monde», affirme le président du Conseil national des lignes aériennes du Canada, George Petsikas, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires.

Loyers fonciers plus élevés

Il note que les aéroports de Plattsburgh et de Burlington attirent un grand nombre de voyageurs québécois et que près de 40% des plaques d'immatriculation dans le parc de stationnement de l'aéroport de Buffalo sont des plaques ontariennes.

«Pourquoi? Parce qu'on n'y paie pas toutes ces taxes, parce que c'est moins cher d'y voyager», affirme-t-il.

Selon l'étude, réalisée par le professeur Fred Lazar, de la Schulich School of Business, les frais les plus problématiques représentent 12,28$ par passager aux 15 principaux aéroports canadiens, soit environ 5% du tarif intérieur et international moyen. Ces frais sont liés aux loyers fonciers que doivent assumer les aéroports canadiens, au Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien, à la taxe d'accise fédérale sur le carburant aérien et aux paiements que doit verser NavCanada pour le service de sa dette de 1,5 milliard, contractée au moment de sa privatisation. Il faut toutefois ajouter à ces frais le supplément assurance et les taxes de vente fédérale et provinciale. L'effet est dramatique, surtout sur les vols court-courrier.

Pour un aller simple entre Toronto et Montréal sur les ailes d'Air Canada, au tarif Tango Plus de 159$, ces taxes et frais atteignent 77,31$, pour un total de 236,31$. Les taxes et frais représentent ainsi 33% du total.

Les frais et taxes atteignent 69,26$ pour un aller simple de Québec à Toronto sur les ailes de WestJet, alors que le tarif de base est de 99$. Ces frais et taxes représentent 41% du tarif total de 168,26$.

Le Conseil national des lignes aériennes du Canada regroupe les quatre principaux transporteurs aériens canadiens, soit Air Canada, WestJet, Jazz et Air Transat. Avec des effectifs de 40 000 personnes, ces sociétés transportent annuellement 48 millions de passagers et enregistrent des revenus de 14 milliards de dollars.

L'étude souligne qu'Air Canada, WestJet et Jazz ont enregistré un bénéfice d'exploitation de 235 millions en 2008 et une perte d'exploitation de 16 millions en 2009. Or, le gouvernement fédéral a récolté 839 millions en 2008 et 821 millions en 2009 avec le loyer des aéroports, le droit sur la sécurité, la taxe d'accise sur le carburant et les paiements de Nav Canada. L'auteur de l'étude estime que le gouvernement fédéral traite l'industrie comme une vache à lait.

Ottawa fait la sourde oreille

Il croit que l'abolition de ces politiques problématiques aurait de tels impacts positifs sur l'économie canadienne à long terme que le gouvernement pourrait rentrer dans ses frais, et même faire de l'argent, au cours des 15 prochaines années.

M. Petsikas admet toutefois que ce message ne sera pas facile à faire passer à Ottawa, surtout en cette période de réduction du déficit.

«C'est sûr que le gouvernement ne cherche pas activement à diminuer ses revenus, reconnaît-il. Mais même quand le gouvernement avait des surplus budgétaires très intéressants, il avait la même réponse: non, on garde les frais en place. Parce que c'est le transport aérien, il n'y a personne qui va s'énerver avec ça. Mais nous sommes en train de prouver qu'il y a un coût à cela.»