L'industrie ferroviaire, qui tient salon cette semaine à Berlin, affiche un bel optimiste, car de nombreux pays ont choisi de développer les chemins de fer pour les passagers comme pour le fret, même si l'euphorie d'avant-crise est retombée.

En ouvrant le salon spécialisé InnoTrans mardi, Raimund Hosch, directeur de ce qui est le plus important rendez-vous du secteur, a résumé la tendance: «Des milliards d'investissements dans les chemins de fer ont été annoncés. Depuis le dernier salon en 2008, il y a eu la crise mondiale. Ces milliards ont parfois été reportés, mais ils n'ont pas été supprimés!»

«Si vous regardez les gens, tout le monde rayonne. Il y a de la joie dans ce salon!», croyait même percevoir Hans-Jörg Grundmann, le patron de la division Mobilité du groupe allemand Siemens.

À défaut de joie, on a surtout vu une frénésie certaine dans les allées d'InnoTrans, où 100 000 visiteurs étaient attendus. Dans de nombreux stands on regrettait même de n'avoir pas prévu davantage d'espaces pour accueillir des conversations.

«Le marché, je le dis bon. Il est stable, il n'a pas baissé pendant la crise. Et le pipeline d'appels d'offres à venir est important», estime André Navarri, le président de Bombardier Transport, numéro un mondial du secteur.

«Le marché est solide», confirme son homologue chez le français Alstom Transport, Philippe Mellier.

Pourtant, constate-t-il, «nous allons perdre deux à trois années de croissance avec la crise».

«Il y a surtout eu un gros, gros problème avec le fret qui a le plus souffert de la crise, et donc les constructeurs de locomotives», analyse-t-il, constatant aussi que «tout l'argent promis pour les infrastructures par les divers plans de relance n'a pas été disponible et dépensé».

Selon les chiffres de l'association professionnelle Unife, le marché du ferroviaire a crû de 86 milliards d'euros sur les années 2005-2007 à 99 milliards en 2008-2010, puis devrait rester à ce niveau sur les trois années suivantes (il y a souvent un décalage dans le temps, les reports de commandes actuels se traduisant plus tard dans les chiffres).

«On est sur un plateau assez haut», observe Virginie Poirier, économiste à l'Unife. Le vrai rebond est attendu dans cinq ans, avec un marché estimé à 111 milliards d'euros pour les années 2015-2017.

Pourquoi le marché est-il solide? «Parce que les problème restent les mêmes», résume André Navarri: congestion urbaine, besoins de déplacements rapides, engorgement des corridors de fret...

Plusieurs marchés font saliver les industriels, bien au-delà des frontières de l'Europe et des États-Unis où les projets de renaissance du rail du président Barack Obama peuvent encore sembler un peu flou.

Ce sont surtout les «primo-accédants», ces pays qui partent de rien ou presque qui «ont compris que le ferroviaire est la solution», pour reprendre une expression de Philippe Mellier: l'Algérie, l'Argentine, les pays du Golfe, Israël, le Maroc... et l'Inde, «où il y a un contrat de mille locomotives à sortir: il y en a pour 5 milliards de dollars!»

Autre eldorado du rail, la Russie, qui veut rénover son matériel et notamment acheter 20 000 locomotives en vingt ans, «plus que tout ce que vous pouvez imaginer»: 1000 par an, c'est l'équivalent de toute la production mondiale actuelle, souligne le patron d'Alstom Transport.

Il y a enfin le formidable marché chinois, où tous avancent leur pions, Bombardier en tête. Mais il est très difficile d'accès, et les firmes occidentales ne veulent pas y laisser toute leur technologie.