Levée de la restriction du nombre de permis de taxi et flottement des tarifs : c'est l'avenue que proposent deux chercheurs de l'Institut économique de Montréal (IEDM), dans une étude publiée aujourd'hui.



Une déréglementation de l'industrie du taxi, comme en ont connu l'Irlande et la Nouvelle-Zélande, réduirait le temps d'attente et le prix des courses, soutiennent Germain Belzile, directeur de la recherche à l'IEDM, et Vincent Geloso, étudiant de maîtrise à la London School of Economics.

« Le système actuel nuit aux clients et nuit à une bonne partie des chauffeurs, ceux qui sont entrés sur le marché plus récemment », affirme Germain Belzile.

Pour acquérir un permis de taxi plutôt que louer sa voiture, un chauffeur montréalais doit présentement débourser environ 200 000 $. Les intérêts de cette dette annulent en bonne partie « les revenus élevés provenant des tarifs réglementés et de l'abondance relative de la clientèle », écrivent les auteurs.

L'herbe est plus verte en Irlande

Une déréglementation à la mode celtique permettrait-elle de corriger ces travers ?

En Irlande, en 2000, un jugement des tribunaux a éliminé toute restriction au nombre de permis. Résultat, le nombre de taxi a triplé en deux ans et quintuplé en dix ans. Le temps d'attente a diminué en conséquence. À Dublin, la proportion de clients ayant attendu moins de 10 minutes est passée de 58 % en 1997 à 81 % en 2008.

Introduite en 2008, une nouvelle grille a fixé des tarifs maximaux pour diverses périodes de la journée. Les clients peuvent négocier une réduction avant la course.

Une expérience similaire en Nouvelle-Zélande a entraîné une baisse de tarif en dollars constants de 15 % à 25 % dans les grandes villes, relèvent encore les chercheurs.

Selon leurs calculs, les tarifs en dollars constants du taxi à Montréal ont augmenté de 15 % depuis 15 ans. Pendant ce temps, les prix des déplacements aériens ont diminué sur le marché relativement déréglementé de l'Amérique du Nord.

Germain Belzile reconnaît que la déréglementation irlandaise a fait des mécontents chez les chauffeurs qui avaient payé leur permis à prix d'or. Pour rétablir l'équité sur le marché montréalais, il suggère une compensation établie en fonction du prix payé pour le permis.

Le coût ne serait pas nécessairement exorbitant pour le Trésor public, estime-il. Il donne l'exemple de l'élimination des quotas de lait australiens en 2000. Les producteurs ont été indemnisés grâce à une taxe temporaire prélevée sur le prix du lait. Calculée sur un prix à la baisse, elle n'a pas affecté le budget du consommateur.

Un système déréglementé faciliterait l'entrée de nouveaux joueurs sur le marché du taxi montréalais, mais l'ajustement à la demande entraînerait aussi des retraits plus fréquents, raccourcissant ainsi la carrière et l'expérience des chauffeurs.

« Il y aurait sans doute plus de roulement, reconnaît Germain Belzile. Mais en conservant les règlements actuels pour la qualification, je ne vois pas de problème. »

Attaquer le vrai problème

« Présentement, ce sont les chauffeurs qui attendent les clients », réplique Dory Saliba, président de Taxi Hochelaga et président de la section montréalaise du Comité provincial de concertation et développement de l'industrie du taxi. « Ça fait des années que l'industrie fonctionne, et fonctionne bien », dit-il. Ce n'est que depuis la récession de 2008 que la rentabilité a diminué.

« On est fonctionnel avec 4400 voitures, on est capable de relever le défi, poursuit-il. Il faut reprendre les marchés qui doivent revenir aux taxis, publiciser ces marchés, et convaincre les gens de prendre le taxi. »