La fermeture d'une grande partie du ciel européen depuis jeudi commence à coûter cher aux compagnies aériennes, qui se remettent à peine de la crise et s'impatientent désormais du maintien des interdictions de vol.

Au cinquième jour de perturbation du trafic, l'Association internationale du transport aérien (IATA) a tiré la sonnette d'alarme: «L'ampleur de cette crise est désormais plus importante que le 11 septembre», a jugé Giovanni Bisignani, le directeur de cette association qui représente 230 compagnies aériennes dans le monde.

Le manque à gagner pour les compagnies, qui ont vu plonger leurs cours de bourse lundi, est estimé par IATA à plus de 200 millions de dollars par jour. Mais il faut aussi ajouter des coûts supplémentaires comme le déroutement des avions vers les aéroports ouverts, le logement des passagers ou des équipages bloqués loin de chez eux et l'entretien d'avions éloignés de leur base.

Certains transporteurs ont évalué ce que leur coûte la crise chaque jour: 35 millions d'euros pour Air France-KLM, de 15 à 20 millions de livres (17 à 26 millions d'euros) pour British Airways, de 5 à 9 millions d'euros pour la scandinave SAS.

Par ailleurs, même en période d'activité réduite, «les compagnies ont de toute façon des salaires à verser, des coûts fixes», souligne un analyste parisien.

La situation est cependant très diverse selon les compagnies, ajoute-t-il. Certaines comme SAS, de taille moyenne et dont la trésorerie a déjà été fragilisée par la crise, auront plus de mal à s'en sortir facilement. La compagnie scandinave envisage d'ailleurs de mettre à pied une partie de son personnel.

Les mastodontes du transport européen comme Air France-KLM, Lufthansa ou British Airways (BA) ont en revanche les reins plus solides pour faire face à des difficultés temporaires.

 BA, dont tous les vols ont été annulés lundi, s'est ainsi voulue rassurante. Elle affirme avoir assez de fonds (1,7 milliard de livres en caisse) «pour soutenir une période de fermeture considérable de l'espace aérien britannique».

Reste que l'actuelle paralysie risque de couper dans son élan un secteur qui était en train de se remettre des lourdes conséquences de la crise économique.

En mars, IATA avait noté que le transport aérien mondial montrait des signes de reprise grâce à l'Asie et avait élaboré des prévisions moins pessimistes pour 2010.

«Cette intempérie arrive clairement au mauvais moment pour les compagnies aériennes dont l'environnement de marché commençait enfin à s'améliorer significativement», notent les analystes du CM-CIC.

Face à la facture salée du nuage de cendre, les compagnies mettent aujourd'hui la pression sur les gouvernements européens qu'elles accusent d'avoir mal géré la crise. «Sans évaluation du risque, sans consultation, sans coordination et sans leadership», déplore le directeur de IATA.

Dès le week end, des compagnies comme KLM et Lufthansa avaient mené des vols d'essai apparemment sans problème et avaient commencé à s'interroger à voix haute sur les critères de fermeture de l'espace aérien.

Lundi, IATA est revenue à la charge, demandant l'ouverture à la circulation de certains couloirs aériens. D'autant que même après la réouverture totale du ciel, le retour à la normale du trafic ne sera pas immédiat et devrait prendre «de trois à six jours».

Devant ces inquiétudes, l'Union européenne a annoncé lundi qu'elle était prête à autoriser les États à aider financièrement leurs transporteurs aériens, comme après les attentats du 11 septembre 2001.