L'avion de transport militaire européen Airbus A400M a effectué vendredi un premier vol réussi, une étape importante alors que d'âpres négociations financières continuent entre l'industriel et ses clients, mécontents des retards du programme.

Le futur avion de transport des armées européennes a décollé du site d'Airbus à Séville, dans le sud de l'Espagne, à 10H16 locales (09H16 GMT) dans un ciel dégagé.

Après presque trois heures et quarante-cinq minutes de vol au-dessus de l'Espagne, il a atterri sans encombre, salué par plusieurs centaines de journalistes, militaires, salariés d'Airbus et politiques, dont le roi d'Espagne Juan Carlos, conviés sur le site de l'avionneur européen.

Ce premier vol d'essai, effectué avec près d'un an et demi de retard, a été mené par une équipe de six personnes: deux pilotes - un Britannique et un Espagnol - et quatre ingénieurs navigants français. Le commandant, Edward Strongman, est un ancien pilote de la RAF.

L'avion propulsé par quatre hélices a été équipé pour l'occasion de quinze tonnes d'instruments d'essai en vol. Ses performances ont été surveillées en temps réel par des équipes d'ingénieurs à Séville et Toulouse.

L'équipage devait notamment vérifier le fonctionnement des moteurs et effectuer des évaluations des équipements de l'A400M.

Ce premier vol marque le début d'une campagne d'essais qui doit durer «plus d'un an», a indiqué à l'AFP Louis Gallois, le président exécutif d'EADS, maison mère d'Airbus. «Un deuxième avion va voler fin mars et un troisième avant l'été» 2010, a-t-il expliqué.

Le premier exemplaire de l'A400M sera livré «début 2013» à la France, a ajouté M. Gallois. Elle aurait dû normalement le recevoir en octobre 2009 pour commencer à remplacer sa flotte de Transall vieillissants.

Le projet a été lancé en 2003 par sept pays de l'OTAN (Allemagne, Espagne, France, Royaume-Uni, Turquie, Belgique et Luxembourg), qui ont commandé à Airbus 180 appareils pour 20 milliards d'euros.

Mais le développement de l'avion et sa motorisation se sont avérés plus complexes que prévu. L'A400M est équipé de quatre turbopropulseurs de 11 000 chevaux, les plus puissants jamais construits en dehors de la Russie.

Conséquence: les premières livraisons interviendront avec au moins trois ans de retard sur le calendrier initial.

À cause de ces retards, EADS a déjà été contraint de prendre pour 2,4 milliards d'euros de provisions et n'exclut pas de nouvelles charges. Le groupe discute à l'heure actuelle avec les pays clients pour trouver un nouvel accord sur le calendrier de livraison, les spécificités de l'appareil ou encore son prix.

Une nouvelle réunion était prévue vendredi, en marge du premier vol, sur la question du partage des surcoûts entre l'industriel et ses clients.

Les négociations ne portent pas sur «une petite somme», a reconnu M. Gallois, alors que le chiffre de 5 milliards de dépassement de coûts est régulièrement évoqué.

«Il faut remettre ce contrat sur ses rails: on le fait techniquement, et on le montre aujourd'hui avec le vol, il faut le remettre sur ses rails sur le plan contractuel, c'est l'intérêt de tout le monde», a jugé M. Gallois, qui souhaite qu'un accord soit trouvé pour la fin de l'année.

Le ministre français de la Défense Hervé Morin a quant à lui jugé que «l'effort doit être partagé entre les États et les industriels».

Selon une source française proche du dossier, la négociation est cependant «compliquée» et la question des conditions financières représente encore «quelque chose d'extrêmement délicat».