Le grand patron de CAE, Robert Brown, se ravise et croit que la CSeries pourra se faufiler entre les appareils de Boeing et d'Airbus et faire son chemin.

En novembre 2000, alors qu'il était président de Bombardier, M. Brown avait enterré l'ancêtre de la CSeries, le BRJ-X, après avoir exprimé des craintes au sujet de la concurrence de Boeing et d'Airbus. Cette fois-ci, les conditions sont plus propices.

«Boeing et Airbus sont absorbés par la situation du Dreamliner (le 787), de l'A380, et par la situation de l'économie en général», a noté M. Brown, au cours d'une rencontre avec l'équipe éditoriale de La Presse.

Le président et chef de la direction de CAE quittera son poste cette semaine, à l'issue d'un mandat de cinq ans.

M. Brown était président de Bombardier Aéronautique, puis président et chef de la direction de Bombardier, à la fin des années 90, lorsque l'entreprise a étudié la possibilité de créer un avion de 100 à 115 places, avec des rangées de cinq sièges, le BRJ-X. Toutefois, au cours d'une conférence à New York en avril 2000, il avait affirmé que Bombardier n'avait aucun intérêt à entrer en concurrence avec Boeing ou Airbus.

À l'époque, l'avionneur américain fabriquait le 717, un appareil de 106 places, et envisageait la possibilité de le ramener à moins de 100 places. Pour sa part, Airbus fabriquait l'A318, un appareil de 107 sièges qui est encore en production, mais qui ne connaît pas une grande popularité.

Bombardier a annoncé quelques mois plus tard qu'elle renonçait au BRJ-X  pour se concentrer sur ses avions régionaux plus petits. L'idée d'un gros appareil commercial ayant des rangées de cinq sièges a refait son apparition en 2004 sous le nom de CSeries, avant de disparaître en 2006 et de réapparaître définitivement en 2007.

M. Brown, qui a quitté la direction de Bombardier en décembre 2002, a fait observer que Boeing et Airbus avaient maintenant d'autres chats à fouetter. L'avionneur américain doit gérer les énormes retards et les pépins technologiques qui caractérisent le développement du 787, alors qu'Airbus se concentre sur l'avion de ligne A350 et l'avion de transport militaire A400M après avoir frôlé la débâcle avec l'A380.

M. Brown a ajouté que la nouvelle technologie développée par Pratt & Whitney, la turbosoufflante à réducteur, constituait un autre élément qui jouait en faveur de la CSeries.

CAE participera à l'aventure de la CSeries en réalisant le premier simulateur de vol complet et en fournissant une série de services et d'outils de simulation qui devraient faciliter la conception et le développement de la famille d'appareils de 110 à 130 places.

M. Brown a insisté sur l'importance de continuer à investir dans la recherche et développement, même en période économique difficile.

«Il faut avoir la discipline de continuer à faire ces investissements, parce que c'est l'avenir», a-t-il soutenu.

Il a également incité les entrepreneurs à faire preuve de plus d'ambitions et à regarder au-delà des États-Unis.

«Les États-Unis, c'est tout près, c'est facile, mais qu'est-ce qui arrive s'il y a un problème dans ce pays?» a-t-il lancé.

Il a aussi suggéré aux gouvernements de diriger leur aide vers les entreprises qui font de la recherche et du développement, et non pas de simplement préserver des usines, comme dans le secteur de l'automobile.

«Dans ce domaine, il n'y a pas de design ici, il n'y a pas d'ingénieurs, on parle d'usines, a-t-il déclaré. Je n'ai rien contre le fait d'aider ces usines en tant que mesures de transition, mais je préférerais que les gouvernements aident les Bombardier, les autres entreprises comme cela.»