La récession a beau baisser la garde, le marché de l'aviation d'affaires ne se relèvera pas de sitôt.

Selon un analyste américain spécialisé dans le secteur, il faudra 10 bonnes années avant de voir les ventes d'avions d'affaires atteindre les sommets atteints en 2008. Le marché continue à se détériorer, mais à un rythme beaucoup moins rapide qu'auparavant.

«Plusieurs facteurs ont convergé pour créer une année record en 2008, avec 1313 livraisons, a déclaré le président de la firme Brian Foley Associates, M. Brian Foley. La probabilité que ces importants facteurs se conjuguent de nouveau est plutôt faible.»

Selon lui, la période «phénoménale» qui s'est déroulée de 2003 à 2008 est due au fait que «tout ce qui pouvait arriver de mieux s'est matérialisé»: les marchés boursiers ont atteint des sommets, le produit intérieur brut a connu une belle croissance, dépassant les 10% dans certaines régions, les bénéfices corporatifs et les fortunes personnelles ont progressé de façon importante.

M. Foley a également fait observer qu'environ 50% des acquisitions de biréacteurs d'affaires devaient faire l'objet de financement. «Nous ne reverrons pas de sitôt cet environnement de crédit facile, qui comprenait des taux d'intérêt peu élevés, l'absence de mise de fonds et des échéances prolongées», a-t-il affirmé.

Il a noté que les livraisons d'avions suivaient d'environ un an ou deux la mise en place d'un marché favorable. «Il faudrait qu'un environnement parfait se matérialise au cours des huit prochaines années pour que les livraisons atteignent le sommet de 2008 d'ici 2018, a-t-il noté. Cela semble improbable à la suite d'une récession mondiale.»

La firme UBS Securities croit pour sa part que le marché de l'aviation d'affaires atteindra bientôt le fond du baril. Après avoir mené un sondage auprès de grands joueurs de l'industrie de l'avion d'affaires, comme des courtiers, des manufacturiers et des financiers, la firme a décelé un ralentissement du rythme de détérioration du marché.

«Notre sondage reflète une croissance de l'intérêt des clients en raison d'un déclin de 30 à 40% des prix et d'une certaine amélioration de l'accessibilité du crédit, a fait savoir l'analyste David Strauss. Mais bien que l'intérêt soit de retour, les transactions sont encore rares parce que les attentes des acheteurs et des vendeurs ne sont pas encore alignées.»

M. Strauss croit qu'on pourrait même voir de nouvelles coupes dans les cadences de production.

D'ailleurs, Cessna, une filiale de Textron, a annoncé la semaine dernière qu'elle annulait purement et simplement son projet de biréacteur d'affaires Citation Columbus, un appareil qui aurait concurrencé le Challenger 605 de Bombardier.

UBS est modérément optimiste face au titre de Textron: M. Strauss estime qu'il pourrait se transiger à une valeur légèrement supérieure en raison d'une amélioration du bilan de la multinationale. Il s'est montré plus enthousiaste au sujet de l'action de Bombardier, dont il recommande l'achat.

«Nous estimons que le secteur transport à lui seul vaut trois dollars, a-t-il fait. En outre, nous pensons que le secteur aéronautique est bien placé pour passer à travers la tempête d'un point de vue de liquidités et de productivité.»

Bombardier vient toutefois de recevoir une nouvelle tuile: le transporteur italien My Way Airlines a été forcé de mettre fin à ses activités en raison de difficultés financières. Or, My Way avait commandé 15 biréacteurs régionaux CRJ1000 à Bombardier. L'annulation de cette commande pourrait entraîner une baisse de la cadence de production à l'usine de Mirabel, où son assemblés les CRJ1000.