L'industrie aérospatiale canadienne ne vole pas très haut ces jours-ci, mais elle n'est pas sur le point de s'écraser. Elle devrait même demeurer profitable.

«L'économie est au beau milieu d'une récession et l'industrie aérospatiale canadienne n'est pas à l'abri, écrit l'économiste Valérie Poulin dans un rapport du Conference Board sur cette industrie. Les entreprises doivent contrôler leurs coûts si elles veulent passer à travers cette turbulence le plus doucement possible. Mais tant que l'industrie fera preuve de prudence, elle devrait demeurer relativement en santé.»

Les bénéfices de l'industrie avaient atteint un sommet en 2001, soit près de 2,5 milliards de dollars. Ils sont tombés à 592 millions en 2008 et devraient se situer autour de 620 millions en 2009. Après une très légère baisse en 2010, ils devraient recommencer à prendre de l'altitude en 2011. Le Conference Board s'attend à ce que les bénéfices augmentent de 3,3 pour cent en moyenne par année pour atteindre 875 millions en 2013.

«En général, l'industrie semble assez robuste pour faire face à la crise, écrit Mme Poulin. Bien sûr, elle est touchée par la récession, mais elle s'en tire beaucoup mieux que bon nombre d'autres industries. Toutefois, les prochains 12 mois seront déterminants pour le bien-être de l'industrie à long terme.»

Les transporteurs commerciaux doivent faire face à une diminution du nombre de passagers et à un resserrement du crédit, ce qui les force à réduire leur capacité, à retirer des appareils et à retarder ou annuler des commandes pour de nouveaux appareils.

C'est toutefois l'effondrement de l'aviation d'affaires qui cause le plus de torts à l'industrie. Comme l'aviation commerciale, l'aviation d'affaires doit faire face à la récession et au resserrement du crédit. Mais en plus, elle doit composer avec une animosité grandissante du public, qui perçoit les biréacteurs d'affaires comme une dépense extravagante.

«General Motors et Ford ont mis leurs biréacteurs en vente après que des politiciens américains aient noté l'incongruité qu'il y avait à se rendre à Washington à bord de biréacteurs luxueux pour aller demander de l'argent aux gouvernements, rappelle Mme Poulin. D'autres grandes entreprises, désireuses de projeter la même image de frugalité, ont fait de même.»

Tout n'est cependant pas totalement noir. Le Conference Board s'attend à ce que l'économie américaine commence à se rétablir vers la fin de l'année. En outre, ces dernières années ont vu l'émergence de nouveaux marchés en Russie, en Europe de l'Est et en Chine.

«Une nouvelle classe de gens d'affaires est en croissance et devrait être de retour en force d'ici 2010», soutient Mme Poulin.

Elle souligne également la solidité du carnet de commandes de l'industrie canadienne. Sa valeur atteignait 38 milliards en mars dernier, ce qui est à peine moins élevé que les 39 milliards de novembre 2008. Cela représente presque deux ans de production.

«Cela signifie que même avec quelques annulations, l'industrie peut passer à travers la tempête pendant encore quelques mois supplémentaires, même sans nouvelle commande, affirme Mme Poulin. Or, il y a encore de nouvelles commandes: après avoir ralenti à la fin de 2008, les commandes ont dépassé les deux milliards de dollars en février et en mars.»

Les revenus de l'industrie aérospatiale devraient décroître quelque peu en 2009, soit un premier déclin en six ans, pour reprendre leur ascension en 2011.

L'économiste du Conference Board rappelle finalement que le secteur de la défense vient en aide à l'industrie canadienne.

«Les gouvernements établissent leur budget indépendamment des cycles d'affaires, indique-t-elle. Les entreprises impliquées dans la défense constituent donc un havre en période de tempête économique, pourvu que le gouvernement fédéral maintienne les dépenses liées à ce secteur.»