En dépit des intempéries actuelles dans l'aviation commerciale, Embraer n'a pas l'intention de laisser tomber ce secteur.

L'avionneur brésilien étudie plutôt la possibilité d'envahir encore davantage les plates-bandes de Bombardier.

Alors que l'entreprise montréalaise hésite toujours à l'idée de lancer une version allongée de son appareil turbopropulsé Q400, Embraer pourrait la prendre de vitesse et lancer elle-même un avion turbopropulsé de grande taille.

«C'est une possibilité», a souri le vice-président exécutif de l'aviation commerciale chez Embraer, Mauro Kern, en entrevue avec La Presse Affaires sur la terrasse du chalet d'Embraer au salon aéronautique du Bourget, entre deux averses.

Encore hier, le président de Bombardier Avions commerciaux, Gary Scott, a affirmé qu'il n'y avait pas d'urgence à lancer le Q400X.

«La version allongée du Q400 fait partie de notre avenir, mais nous avons encore un solide carnet de commandes pour le Q400», a-t-il déclaré.

Embraer a également l'intention de concurrencer le plus petit appareil de la CSeries, le CS100, à 110 places, qui correspond à l'Embraer E195. L'entreprise brésilienne pourrait même lancer quelque chose pour contrer le plus gros appareil de la CSeries, le CS300, à 130 places.

«Nous travaillons très fort à étudier toutes ces possibilités, a affirmé M. Kern. Mais ce n'est pas encore le temps de prendre une décision.»

Ce n'est pas la crise économique qui retarde cette décision d'Embraer, mais l'état de la technologie. À l'heure actuelle, les grands motoristes se poussent du coude en développant diverses technologies de moteurs: la turbosoufflante à réducteur pour Pratt & Whitney, le concept de rotor ouvert pour le consortium CFM.

«Nous allons regarder ce qui en sortira», a déclaré M. Kern.

Embraer veut également étudier les mouvements de ses adversaires avant de prendre position. Il y a Bombardier, bien sûr, mais il y a aussi de nouveaux arrivants, comme le Superjet 100 de l'entreprise russe Sukhoi et l'ARJ21 de la société chinoise AVIC 1.

«Ce sont des appareils qui vont certainement prendre des parts de marchés, surtout dans leur marché domestique», a noté M. Kern.

Il y a plusieurs années, Embraer a établi une coentreprise en Chine pour construire des biréacteurs régionaux de 50 places. La commande de 50 appareils placée auprès de cette coentreprise par un transporteur chinois a toutefois récemment été réduite à 25 appareils.

«Nous ne pouvons pas être excessivement optimistes à l'idée de vendre des appareils contre l'ARJ, a reconnu M. Kern. Mais notre coentreprise est très résistante et notre partenaire chinois fait du très bon travail.»

Comme tous les autres avionneurs, Embraer a été frappée durement par la crise économique et la crise du crédit. En février dernier, elle a dû annoncer la mise à pied d'environ 20% de ses effectifs. Au Bourget, elle a réduit la taille de son chalet et a décidé de ne pas exposer d'avions afin d'économiser.

«Tout le monde connaît nos appareils», a lancé M. Kern.

Depuis quelques années, Embraer travaille sur un nouvel appareil de transport militaire, le KC-390. L'avionneur a officiellement lancé ce programme en avril dernier.

M. Kern a affirmé que cela ne signifiait pas que l'aviation commerciale passait maintenant au deuxième plan chez Embraer.

«Ce n'est pas parce que nous approfondissons le marché de la défense que nous ne faisons plus rien du côté commercial», a-t-il soutenu.

D'ailleurs, Embraer a annoncé hier des commandes pour sept appareils E190 et un E175.

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