Les irrégularités dévoilées par la Banque Laurentienne à propos de l'octroi de prêts hypothécaires pourraient porter ombrage au plan de transformation visant à doubler la taille de l'institution financière, estiment certains analystes.

La banque a fait savoir dans son rapport annuel qu'elle pourrait devoir racheter jusqu'à 304 millions en prêts vendus à un acheteur, en raison notamment de fausses déclarations effectuées par des clients.

Après avoir abandonné près de huit pour cent à la Bourse de Toronto mardi, l'action de la Laurentienne était plutôt stable, mercredi après-midi, se négociant à 55,36 $, en baisse de 64 cents, ou 1,14 %.

Jusqu'à présent, à la suite des vérifications, la Laurentienne prévoit racheter pour 180 millions de prêts jugés problématiques, ce qu'elle peut faire avec les liquidités à sa disposition.

D'ici la mi-février, la banque québécoise devra également procéder à un examen approfondi pour des prêts hypothécaires totalisant 1,1 milliard qui ont été accordés dans son réseau de succursales, ce qui préoccupe Darko Mihelic, de RBC Marchés des capitaux.

«Nous estimons qu'il pourrait y avoir des risques au chapitre de la croissance du portefeuille de prêts hypothécaires, des coûts de financement (...) et de la réputation si les problèmes sont plus importants», écrit-il dans une note.

Tous ces éléments pourraient ainsi contrebalancer les efforts de croissance mis de l'avant par la direction de la Laurentienne, ajoute M. Mihelic, qui abaisse de 60 $ à 55 $ son cours cible pour le titre de la septième banque en importance au pays.

La Laurentienne rachètera notamment pour 89 millions de prêts hypothécaires d'un portefeuille de 655 millions vendus par sa filiale B2B Banque à un tiers, dont l'identité n'a pas été révélée.

Par l'entremise de cette division, l'institution financière offre entre autres des solutions hypothécaires résidentielles jugées non traditionnelles à des acheteurs dont le profil financier ne se qualifie pas auprès d'une grande banque.

Plus tôt cette année, la découverte d'irrégularités chez le prêteur alternatif Home Capital avait entraîné le dépôt d'accusations de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario et poussé l'entreprise dans une crise ayant menacé sa survie.

«Nous sommes une organisation très différente dans une situation différente de ce qui est survenu chez Home Capital», a expliqué mercredi le président et chef de la direction de la Laurentienne, François Desjardins, au cours d'une entrevue à la chaîne télévisée anglophone BNN.

Il a aussi fait valoir que la Laurentienne avait de multiples sources de financement à sa disposition, différents portefeuilles de prêts, qu'elle était diversifiée géographiquement et qu'elle était reconnue comme un prêteur prudent.

Réitérant que rien ne suggérait que des employés de l'institution financière auraient pu être impliqués dans ces irrégularités, M. Desjardins - qui n'était pas disponible pour accorder d'autres entrevues - a assuré que les correctifs nécessaires avaient été apportés.

La direction de la Laurentienne a tenté de minimiser les irrégularités, expliquant que les prêts concernés ne représentaient que 0,8 % de son portefeuille total de prêts.

De son côté, Scott Chan, de Cannacord Genuity, a rappelé que les problèmes entourant les prêts hypothécaires ne concernent pas une région en particulier ou quelques courtiers, ce qui, à son avis, démontre à quel point il est urgent pour la Laurentienne de procéder à un audit de son portefeuille.

«Nous croyons que l'impact pourrait s'avérer minimal si on ne découvre pas d'autres problèmes dans le cadre des vérifications menées dans le réseau de succursales», écrit l'analyste.

Il estime que ces pépins ne devraient pas peser outre mesure sur le bilan financier de la banque, qui dispose de plusieurs sources de financement à sa disposition. Néanmoins, l'analyste a également révisé à la baisse son cours cible, qui passe de 67 $ à 61 $.

Robert Sedran, de CIBC Marchés mondiaux, a quant à lui souligné qu'une des inquiétudes entourant la cadence du plan de transformation de la Laurentienne concernait les risques associés à des changements rapides.

Dans un rapport, l'analyste explique que le lien entre les irrégularités dévoilées et le plan de transformation n'était pas clair, ajoutant que les «risques opérationnels» identifiés étaient «néanmoins troublants».