Ils sont de 40 000 à 50 000 à s'installer au Québec chaque année et les banques leur tendent de plus en plus les bras. Les Marocains, Haïtiens, Chinois et autres Argentins nouvellement arrivés ici sont dans la ligne de mire des banques. Si elles leur offrent des services ciblés depuis plusieurs années, les rapprochements se sont intensifiés au cours des derniers mois.

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Pour plusieurs, la communication est devenue sans équivoque, comme en fait foi cette publicité de la Banque TD Canada Trust parue dans le journal Métro: «Lorsque notre tante est arrivée au Canada, elle a choisi la TD. Nous avons toujours dit qu'elle était très sage.»

Des messages de la Banque Royale (RBC) touchent la même cible: «Nouvellement arrivé au Canada? Vous avez besoin d'une carte de crédit? Nous sommes là pour vous aider.»

«Les nouveaux arrivants constituent une portion de la population de plus en plus importante au Québec et au Canada, confirme Raymond Chouinard, directeur, médias et relations publiques, de RBC Banque Royale. Et l'un des besoins les plus pressants d'un immigrant est d'avoir accès à des services financiers. Environ 85% ouvrent un compte bancaire au cours de leur premier mois ici. Dès qu'ils arrivent, ils veulent avoir des moyens de transférer des sommes, de mettre leur argent en sécurité.»

À l'été, la RBC a d'ailleurs mis en place le programme «Bienvenue au Canada» qui offre des services taillés sur mesure pour les nouveaux arrivants: carte de crédit pouvant être émise sans devoir établir d'antécédents de solvabilité, six mois de services bancaires tout compris sans frais, coffre de sûreté sans frais pendant un an, chèques personnels gratuits, des taux d'intérêt privilégiés sur les certificat de placement garantis... «On répond à un besoin qui augmente en volume et en diversité», note Raymond Chouinard.

Les banques vont jusqu'à établir un contact avant même qu'un étranger n'ait dit bonjour à un douanier canadien. «Depuis 2008, nous avons de la pub sur le site immigrer.com, dans L'Express en France et le Petit Futé notamment, explique Pierre-Franck Honorin, directeur, placements et financement de Mouvement Desjardins. Nous avons une équipe qui accompagne les gens depuis leur pays d'origine. On peut ainsi ouvrir un compte à distance et virer de l'argent avant l'arrivée au Canada.»

En 2007, Desjardins a aussi créé le Carrefour Desjardins au centre-ville de Montréal. «Car 75% des nouveaux arrivants restent à Montréal, note-t-il. Avant, chaque caisse faisait des interventions ponctuelles. En volume d'affaires, les nouveaux arrivants et les communautés culturelles représentent 30% au Carrefour Desjardins. Un chiffre satisfaisant, mais qui est appelé à évoluer, car l'immigration devient plus importante.»

Grâce au Carrefour Desjardins, l'entreprise peut prendre par la main les nouveaux arrivants. «On répond à la question: «Comment fonctionne le système nord-américain?» dit Pierre-Franck Honorin. Il faut du temps pour avoir une expérience de crédit. On bâtit donc cette expérience en moins d'un an par l'intermédiaire d'une carte de crédit.»

S'ajoute à cet appui l'embauche d'employés issus des communautés ethniques pour desservir la clientèle. «Dans une même succursale, on peut servir des gens dans 15 langues», affirme Raymond Chouinard.

Les retombées d'une telle stratégie? Les banques demeurent discrètes à ce sujet. «Ça représente un intérêt très élevé commercialement, dit toutefois Raymond Chouinard. Mais c'est un exercice à très long terme. On parle de développement sur cinq, dix et quinze ans.»

«On essaie d'investir sur des gens qui ont l'intention de s'établir définitivement, ajoute Pierre-Franck Honorin. En tant qu'institution financière, on pense en matière de rentabilité à court, mais aussi à moyen et long terme.»