Deux médecins disent avoir perdu une fortune avec les mauvaises décisions de leur conseiller financier de RBC Dominion valeurs mobilières. Ils réclament 13,8 millions de dollars à RBC et au courtier Érik Moisan.

La poursuite a été déposée à la fin de la semaine dernière au palais de justice de Montréal. Elle a été produite par Lucien Steru et sa conjointe, Dominique Steru, deux médecins français résidant aujourd'hui en Belgique.

Lucien Steru est l'un des anciens actionnaires importants de Phoenix International Sciences de la vie, de Montréal. En 2000, M. Steru vend ses actions dans le cadre d'une offre publique d'achat pour la somme de 40 millions de dollars.

La gestion de ces fonds est confiée à Érik Moisan, de Scotia McLeod. À l'automne 2006, les fonds sont transférés à RBC Dominion, filiale de la Banque Royale, lorsque Érik Moisan y devient vice-président.

Les problèmes des Steru et de leur société de placement, CO.DE.MA, commencent peu de temps après, en janvier 2007. Érik Moisan demande alors aux Steru d'emprunter plusieurs millions de dollars pour les placer dans des «débentures convertibles inversées (DCI)», un produit structuré complexe alors à la mode.

Au départ, les Steru refusent la proposition, faisant valoir qu'ils sont prudents en matière de placements, selon la poursuite. Ils ont d'ailleurs investi presque tous leurs fonds dans des obligations par le passé. Qui plus est, ils sont réticents parce qu'ils ne comprennent guère ce que sont les DCI, dit la requête.

Lors d'un voyage à la résidence des Steru, à Bruxelles, «Moisan devient énormément insistant pour que les demandeurs acceptent d'investir dans les DCI, leur laissant finalement le choix entre investir dans les DCI ou changer de gestionnaire», est-il écrit dans la requête.

Les Steru finissent par accepter d'emprunter 15 millions US, destinés essentiellement aux DCI. L'argent emprunté est cautionné par CO.DE.MA. En 2007, les Steru discutent régulièrement au téléphone avec Érik Moisan, étant donné qu'ils jugent incompréhensibles leurs relevés de placements du fait de la complexité des DCI.

Arrivent 2008 et sa crise financière. Jusqu'en septembre 2008, Érik Moisan rassure les Steru, leur disant que tout va bien. La crise de l'automne 2008 rend les Steru inquiets et leur fait multiplier les demandes d'informations auprès de M. Moisan. Ce n'est qu'à la fin de novembre 2008 qu'ils finissent par apprendre que leurs placements ont fondu d'environ 8 millions de dollars.

Lucien et Dominique Steru soutiennent qu'Érik Moisan a multiplié les fautes professionnelles dans ce dossier. Ils affirment qu'il a unilatéralement modifié les objectifs de placement et leur profil de tolérance au risque, passant d'un profil prudent à un profil «risque élevé».

Confiance trahie

Selon eux, les DCI conviennent aux investisseurs sophistiqués, ayant un bon degré de confort avec les produits structurés. «Moisan a abusé de la confiance des demandeurs et les a incités, à la suite de fausses représentations, à emprunter 15 millions US (...) pour investir dans un produit qui n'était pas conforme à leurs instructions», est-il écrit dans la requête.

Ils réclament aujourd'hui 13,8 millions CAN à RBC et à Érik Moisan, ce qui comprend leurs pertes et celles de CO.DE.MA, de même que les intérêts payés sur un découvert bancaire. À la Banque Royale, le porte-parole, Raymond Chouinard, nous indique qu'il ne peut commenter, le dossier étant devant les tribunaux.