Fabrice Tourre, un jeune trader français diplômé de la prestigieuse École centrale de Paris, se retrouve au centre de l'enquête sur les fraudes de Goldman Sachs.

Cet homme de 31 ans est à l'époque des faits reprochés, en 2007, vice-président au sein d'une unité de produits structurés du prestigieux établissement new-yorkais. Il travaille aujourd'hui à Londres.

Les autorités boursières américaines le citent dans leur plainte, qui le vise personnellement avec Goldman Sachs comme l'instigateur d'une transaction dont certains détails cruciaux n'ont pas été révélés aux investisseurs.

En substance, M. Tourre aurait, sans le révéler à ses clients, laissé un gros client de Goldman Sachs, le fonds d'investissement Paulson, influencer la composition d'un produit financier comportant des valeurs immobilières, alors même qu'il connaissait les positions du fonds Paulson pariant sur la baisse du marché immobilier.

C'est la deuxième fois qu'un financier français se retrouve au centre d'un scandale majeur, après Jérôme Kerviel, licencié par Société générale en 2008.

M. Kerviel, qui doit être jugé par le tribunal correctionnel de Paris en juin, a selon ses supérieurs agi sans leur accord, et engendré des pertes pour la banque.

En revanche M. Tourre a agi au vu et au su de sa direction et a fait gagner de l'argent à son entreprise aux dépens des clients, selon la SEC.

«Tourre et Goldman Sachs sont responsables de l'impression fausse (d'un investisseur trompé) selon laquelle Paulson faisait un pari à la hausse, plutôt qu'à la baisse», a accusé la SEC.

Les deux hommes ont des parcours universitaires inégaux: Kerviel est diplômé de la relativement modeste université Lyon II alors que Tourre est diplômé de l'École centrale de Paris, une grande école d'ingénieurs réputée pour fournir aux banques d'affaires des pointures en mathématiques financières.

Mais les deux hommes se retrouvent par une certaine forfanterie révélée par leurs écrits: en France, Kerviel écrivait qu'il avait «un max de thunes».

À New York, au moment où le marché immobilier américain s'apprêtait à s'effondrer, Fabrice Tourre se vantait d'avoir anticipé la catastrophe, dans un courrier électronique de janvier 2007 cité par la SEC.

«Le bâtiment tout entier est sur le point de s'effondrer à n'importe quel moment maintenant. Seul survivant potentiel, le fabuleux Fab, debout au milieu de toutes ces transactions complexes, à fort effet de levier, exotiques, qu'il a créées sans forcément comprendre toutes les implications de ces monstruosités!!!», écrit-il.

M. Tourre, poursuivi au civil, risque désormais de devoir payer de lourds dommages et intérêts, si la plainte va à son terme.