Le président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet a demandé vendredi aux banques de faire leur devoir envers l'économie en prêtant davantage et les a exhortées à la mesure en matière de bonus.

«Les bénéfices doivent être utilisés - en priorité - pour constituer capitaux et réserves, plutôt que de payer des dividendes ou des indemnités non méritées», a déclaré le Français au cours d'un congrès bancaire à Francfort.

Les banques sont une part importante de l'économie. Les mesures de soutien, de la BCE et des Etats, «ont été mises en place en raison de leur rôle dans l'économie», a insisté le président de la BCE.

«Le secteur financier doit se souvenir qu'il doit servir l'économie réelle, pas le contraire», a-t-il lancé, en référence aux plans de soutien des gouvernements financés sur les deniers publics. «Les indemnités et les bonus doivent être contenus», a-t-il martelé devant la fine fleur de la finance francfortoise.

Depuis le début de la crise financière, qui a débuté en août 2007 après l'effondrement des crédits hypothécaires à risques («subprime») aux Etats-Unis, les établissements de crédit peuvent emprunter des liquidités à des conditions très avantageuses auprès de la BCE.

Après la faillite de la banque d'affaires Lehman Brothers en septembre 2008, la BCE a rendu l'accès à des refinancements encore plus aisé et bon marché.

Un an après, les banques commencent à redresser leurs comptes, et certaines promettent dividendes et bonus comme par le passé.

«Nous devons comprendre l'inquiétude de nos démocraties en ce qui concerne les indemnités et les bonus», a indiqué M. Trichet.

«Il faut éliminer les encouragements à prendre des risques absurdes (...)», a-t-il martelé, comme l'ont récemment approuvé les pays industrialisés et émergents du G20.

Dans le même ordre idée, la chancelière Angela Merkel s'est inquiétée des résistances d'une partie du monde de la finance au durcissement, négocié au niveau du G20, de la réglementation financière, qui vise à mieux encadrer le système financier et à le rendre moins vulnérable aux crises.

Alors que le plus fort de la crise semble passé, elle a prié «instamment» les banquiers «de rester sur une voie constructive», en référence notamment à l'idée de Josef Ackermann, controversé patron de la Deutsche Bank, de constituer un fonds de soutien au secteur financier alimenté par l'Etat et les banques privées.

Les déclarations, particulièrement fermes, de Jean-Claude Trichet illustrent l'inquiétude des banquiers centraux d'un détournement par les banques des aides exceptionnelles de la BCE à leur propre profit.

Le Français a d'ailleurs redit que l'institution n'allait pas maintenir ses aides ad vitam eternam. «Ces mesures devront être dénouées quand la situation se sera normalisée (...)», a-t-il souligné.

«Nous allons faire en sorte que nos mesures extraordinaires d'approvisionnement en liquidités soient retirées de façon progressive», sans mettre en danger la stabilité des prix à moyen/long terme, a-t-il ajouté.

Et les banques doivent s'y préparer dès maintenant, a prévenu le responsable, afin d'éviter tout «symptôme de sevrage» douloureux.