Les consommateurs voyageurs qui croyaient recevoir bientôt un dédommagement de leur institution financière devront prendre leur mal en patience. Les grandes institutions financières canadiennes, condamnées en juin dernier à verser 200 millions de dollars aux détenteurs de cartes de crédit pour avoir imposé des frais de conversion de devises sans délai de grâce, ont choisi de porter la cause en appel. L'affaire, lancée en 2003 à la suite de trois recours collectifs, pourrait se prolonger pendant encore plusieurs années.

Dans le jugement de 200 pages qu'il a rendu en juin, le juge Clément Gascon, de la Cour supérieure, a déclaré que les frais de conversion de devises devaient être admissibles à la période de grâce de 21 jours, afin que les clients qui paient avant la fin de cette période en soient exemptés.

Le juge souligne aussi que certaines institutions n'ont pas divulgué ces frais à leurs clients. Dans un cas comme dans l'autre, ces actes contreviennent à la Loi sur la protection du consommateur.

«On conteste le jugement au motif que le juge a commis plusieurs erreurs de droit», a indiqué hier le directeur (Québec) de l'Association des banquiers canadiens, Jacques Hébert. Pour en savoir plus, il faudra attendre le mois de novembre, quand les institutions financières présenteront individuellement leurs arguments à la Cour d'appel, indique M. Hébert.

«Je suis déçu, mais pas surpris, dit l'avocat Philippe Trudel, de Trudel et Johnston, avocat des requérants. Les banques contestent à peu près chaque ligne du jugement, comme si le juge s'était trompé sur toute la ligne.»

«Des frais qui ne sont pas abusifs»

En entrevue à La Presse Affaires, le porte-parole du Mouvement Desjardins, André Chapleau, a indiqué que les frais en question ne sont ni abusifs, ni illégaux. «La loi n'empêche pas de facturer ces frais», dit-il.

Selon lui, la question est de savoir si ce sont des frais de crédit (comme le soutient le juge Gascon) ou des frais distincts.

Si les tribunaux supérieurs donnaient raison aux requérants et au juge Gascon, «on devrait facturer ces coûts de conversion de devises à tous les détenteurs, alors que seulement 5% d'entre eux utilisent ce service, soutient André Chapleau. Ce serait inéquitable».

Pour le moment, Desjardins continue d'imposer les frais de la même façon. La Banque Nationale n'a pas été en mesure de nous indiquer si elle continuait de le faire.

Si le jugement est maintenu, la somme de 200 millions représentera la plus importante jamais accordée dans un recours collectif au Canada.