Devenu depuis le scandale Kerviel l'un des symboles des dérives bancaires en France, le président de la Société Générale, Daniel Bouton, a annoncé sa démission pour mettre fin aux «attaques répétées» dont il est l'objet.

«J'ai en effet remis ma démission. Le conseil d'administration élira le 6 mai prochain un nouveau président», déclare M. Bouton, 59 ans, dans un entretien au quotidien Le Figaro.«Je fais le choix de m'en aller maintenant pour protéger la banque», affirme M. Bouton, dont la démission avait été réclamée par le président Nicolas Sarkozy après l'affaire de la perte de 4,9 milliards d'euros imputée au courtier Jérôme Kerviel.

«Les attaques répétées qui me visent personnellement, en France, depuis 15 mois m'affectent mais surtout elles risquent de nuire à une banque de 163 000 personnes», regrette M. Bouton, aux commandes de la banque depuis 1997, dans une lettre aux salariés.

Le président de la Société Générale, troisième banque française par sa capitalisation, assure par ailleurs quitter le groupe avec «zéro» indemnité de départ. Il percevra néanmoins une retraite de 730 000 euros par an.

La Société Générale a été au coeur de plusieurs polémiques et scandales depuis l'affaire Kerviel début 2008, qui avait suscité des critiques sur l'insuffisance des contrôles au sein de la banque.

Début 2009, l'annonce de l'octroi 70 000 options d'achat d'actions à Daniel Bouton et de 150 000 au directeur général Frédéric Oudéa, avait fait scandale et terni encore l'image du patron de la Société Générale. Devant le tollé provoqué, les dirigeants avaient finalement dû renoncer à ces actions.

Dernière estocade: le quotidien Libération révélait lundi qu'une filiale de la Générale aurait perdu 5 à 10 milliards d'euros dans des investissements hasardeux.

«Comme tout dirigeant, j'ai certainement commis des erreurs et j'ai pu être maladroit, je le reconnais», concède dans le Figaro Daniel Bouton, regrettant notamment de ne pas avoir «refusé ce plan d'options».

Mais il juge «malvenues» les critiques contre les banques, même s'il dit comprendre «combien la tentation du bouc émissaire peut être forte en période de crise aiguë».

Après la découverte de l'affaire Kerviel, Daniel Bouton avait déjà remis sa démission à son conseil d'administration, mais celui-ci l'avait refusée.

Le président Nicolas Sarkozy l'avait même appelé à «tirer les conséquences» de l'affaire, et la presse se faisait régulièrement l'écho de l'agacement de l'Elysée devant le maintien de Daniel Bouton à la tête de la banque. Mais ce dernier avait fait valoir qu'on ne quitte pas un navire en pleine tempête.

M. Bouton avait toutefois fait monter à la direction générale Frédéric Oudéa, un polytechnicien de 45 ans, ne gardant que la présidence du groupe. La banque avait alors connu une accalmie, parvenant à dégager un bénéfice de 2 milliards d'euros au titre de 2008.

Chauve, regard bleu derrière ses lunettes, Daniel Bouton, originaire d'un milieu modeste, est issu de la haute fonction publique.

Pour le remplacer, le nom de Jean-Martin Folz, ex-patron de Peugeot Citroën est notamment cité. Une autre possibilité serait de confier également la présidence à Frédéric Oudéa.

Daniel Bouton, «en démissionnant, protège l'image de la banque, des clients, des employés», a réagi le ministre du Budget Eric Woerth, tandis que le porte-parole du gouvernement Luc Châtel qualifiait ce départ de «non-événement».