Les dirigeants des trois plus grandes banques canadiennes renoncent à certaines de leurs primes en ces temps difficiles. D'autres le font aussi ailleurs, par choix ou parce qu'on leur force la main. Mais ici, les dirigeants des deux banques québécoises ont décidé de garder toute la cagnotte qu'ils considèrent leur être due.

Les deux principaux banquiers du Québec veulent toutes leurs primes salariales, malgré la conjoncture économique et financière difficile.

 

Ainsi, Louis Vachon, président et chef de la direction de la Banque Nationale [[|ticker sym='T.NA'|]], et Réjean Robitaille, de la Banque Laurentienne [[|ticker sym='T.LB'|]], n'ont pas l'intention d'imiter leurs homologues torontois qui renoncent à des millions de dollars en primes salariales, en invoquant la situation économique difficile.

«La réponse est non. Ces primes font partie de la rémunération totale de M. Vachon et il n'a pas l'intention d'y renoncer», a indiqué le porte-parole médiatique de la Banque Nationale, Denis Dubé.

«Ces primes ont été consenties par le conseil d'administration parce que la banque a obtenu de meilleurs résultats en 2008 par rapport aux cinq autres principales banques canadiennes.»

Commentaire semblable à la haute direction de la Banque Laurentienne. «M. Robitaille n'a pas l'intention de renoncer à une partie de sa rémunération parce qu'elle reflète la performance de la banque l'an dernier, qui a dépassé tous ses objectifs financiers», a indiqué Gladys Caron, vice-présidente aux affaires publiques.

Pourtant, depuis le début de la semaine, les présidents de trois des plus grandes banques canadiennes ont renoncé publiquement à 16,7 millions en primes auxquelles ils étaient admissibles, selon les clauses de leur contrat professionnel.

Deux de ces présidents, Gordon Nixon de la Banque Royale [[|ticker sym='T.RY'|]], et Bill Downe, de la Banque de Montréal [[|ticker sym='T.BMO'|]], ont renoncé en tout à 9 millions en primes qui leur auraient été versées en options d'achat d'actions et autres titres liés à la prochaine performance financière et boursière de leur banque.

Pour les présidents des banques Nationale et Laurentienne, la renonciation à leurs primes semblables pour 2008 équivaudrait à 4,1 millions, la moitié environ de leur rémunération combinée de 7,33 millions. À lui seul, Louis Vachon devrait renoncer à 3,2 millions en primes de titres de sa rémunération totale de 5,28 millions.

Par ailleurs, fait très inusité, les présidents Nixon et Downe ont annoncé leur désistement après que leurs primes eurent été convenues avec le conseil d'administration de leur banque respective, et détaillées même dans leur circulaire envoyée aux actionnaires en prévision de leur prochaine assemblée annuelle.

Bill Downe, de la Banque de Montréal, a indiqué que «ma décision de renoncer à cette rémunération est le résultat de ma réflexion face à la situation économique actuelle».

Pour Gordon Nixon, président de la Banque Royale, renoncer à des primes déjà convenues est «une bonne décision pour moi et pour la banque, en raison de l'état actuel des marchés mondiaux et des défis que doivent relever tant de citoyens au Canada et ailleurs dans le monde».

Relations publiques

Geste significatif ou vil exercice de relations publiques? «Je dis chapeau à M. Nixon et M. Downe dans le contexte économique et financier actuel, même s'il y a un peu de gestion d'image personnelle et de relations publiques dans ces décisions», a commenté Michel Nadeau, directeur général de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques.

Quant à l'autre président de banque ayant renoncé à des millions en rémunération admissible, il s'agit de Gerry McCaughey, de la Banque CIBC [[|ticker sym='T.CM'|]].

Sa renonciation est considérable: au moins 7,6 millions amputés d'une rémunération qui aurait pu atteindre 12,9 millions.

Toutefois, ce montant était prévu pour la rémunération 2007 du grand patron de la banque CIBC, selon son protocole particulier d'évaluation salariale différée. (Sa rémunération pour l'exercice 2008 sera déterminée après la fin de l'exercice 2009.)

Aussi, à la différence des présidents de BMO et de RBC, cette réduction avait été négociée par étapes entre le conseil d'administration et M. McCaughey, à sa demande. Cette démarche est aussi expliquée dans la circulaire envoyée aux actionnaires de la banque CIBC.

Du côté des deux autres grandes banques, le président de la Scotia, Richard E. Waugh, a déjà subi une réduction de sa rémunération admissible de 25% pour l'exercice 2008, à 7,5 millions.

Mais il n'a pas encore dit mot de son intention d'imiter ou non ses vis-à-vis torontois en renonçant à la part de sa rémunération qui est constituée d'options d'achat d'actions et d'autres titres, pour une valeur de trois millions.

Quant à la banque Toronto-Dominion, elle n'a pas encore publié sa circulaire de direction qui détaillera la rémunération de ses hauts dirigeants.

 

LA RÉMUNÉRATION DES BANQUIERS

LOUIS VACHON

Président de la Banque Nationale

Rémunération totale prévue (1)

5,28 millions

var. un an: "40%

Rémunération après désistement

Aucun renoncement

RÉJEAN ROBITAILLE

Président de la Banque Laurentienne

Rémunération totale prévue (1)

2,04 millions

var. un an: "42%

Rémunération après désistement

Aucun renoncement

GERRY McCAUGHEY

Président de la Banque CIBC (2)

Rémunération totale prévue (1)

12,96 millions

var. un an: "85%

Rémunération après désistement

5,3 millions

var. un an: -23%

GORDON NIXON

Président de la Banque Royale

Rémunération totale prévue (1)

9,56 millions

var. un an: -18%

Rémunération après désistement

4,6 millions

var. un an: -60%

BILL DOWNE

Président de la Banque de Montréal

Rémunération totale prévue (1)

6,37 millions

var. un an: -34%

Rémunération après désistement

2,27 millions

var. un an: -76%

1: Rémunération totale selon la circulaire de direction: salaire et prime au comptant, options d'achat d'actions et autres titres de valeur, prestations de fonds de retraite, autre rémunération spéciale.

2: Le calcul de la rémunération du président de la Banque CIBC est décalé d'un an en fonction des résultats subséquents, donc pour 2007 dans ce tableau. Sources: banques