Québec n'exclut aucun scénario, y compris des mesures d'aide, pour soutenir les secteurs de l'aluminium et de l'acier advenant que l'administration Trump change son fusil d'épaule et décide d'imposer des tarifs douaniers.

Mais avant d'en arriver là, le gouvernement Couillard souhaite tout mettre en oeuvre afin que l'exemption temporaire dont bénéficie le Canada devienne permanente, a expliqué vendredi la ministre de l'Économie, Dominique Anglade, à Montréal.

En compagnie de la ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, Mme Anglade rencontrait les représentants des secteurs de l'aluminium, de l'acier, du syndicat Unifor, ainsi que des associations patronales, comme la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI), pour faire le point.

«La raison pour laquelle nous sommes réunis, c'est afin d'être prêts à toutes les éventualités, a expliqué Mme Anglade, en mêlée de presse. Nous allons retourner toutes les pierres afin de faire face à ce qui pourrait être présenté par les Américains.»

Le président américain Donald Trump a exempté le Canada et le Mexique des tarifs douaniers de 25 pour cent sur l'acier et de 10 pour cent sur l'aluminium, tout en se réservant le droit de les imposer plus tard.

Le 45e locataire de la Maison-Blanche lie cette exemption aux résultats des négociations pour le renouvellement de l'Accord de libre-échange nord-américain - une situation que souhaite éviter le gouvernement Trudeau.

Interrogée sur la mise sur pied d'un éventuel plan d'aide comme cela a été le cas à la suite de la dispute canado-américaine sur le bois d'oeuvre, Mme Anglade a répondu que le gouvernement n'était pas encore rendu à cette étape, ajoutant qu'il fallait se préparer à «toutes les éventualités».

Elle a souligné l'importance de se préparer à une éventuelle dispute commerciale afin d'être capable d'avoir le dessus au bout du compte auprès des instances internationales, citant en exemple le litige entre Bombardier et Boeing à propos de la C Series.

La rencontre de vendredi, qui pave la voie à un autre rendez-vous prévu en mai, avait également comme objectif de solidifier le front commun dans les secteurs de l'aluminium et de l'acier - qui représentent plus de 30 000 emplois au Québec - face au protectionnisme américain.

Bien que le Canada ait échappé aux tarifs douaniers, l'épée de Damoclès demeure présente, a souligné la vice-présidente principale de la FCEI, Martine Hébert.

«Un changement pourrait avoir un effet négatif non seulement sur les industries, mais également pour une panoplie de petites et moyennes entreprises qui fournissent par exemple des pièces ou d'autres matériaux aux grands producteurs», a-t-elle expliqué au terme de la rencontre.

Pour sa part, le président de l'Association de l'aluminium du Canada (AAC), Jean Simard, a indiqué que les discussions avaient également abordé l'aspect de la vigilance, puisqu'en vertu des tarifs douaniers imposés par les Américains, certains pays pourraient vouloir passer par le Canada afin d'acheminer leur acier aux États-Unis.

En plus d'aspects «proactifs» pour défendre la position canadienne, des questions plus «défensives» ont également été abordées, a-t-il expliqué au cours d'un entretien téléphonique.

«Une sorte de vigie de marché pour éviter que l'on devienne un bassin d'importation pour des produits qui ne sont pas désirés par les Américains», a dit le président de l'ACC, qui représente les grandes alumineries.

Malgré l'incertitude actuelle, les membres de l'Association ayant déjà des projets d'investissement en cours n'ont pas l'intention de revenir sur leur décision, a affirmé M. Simard.

Néanmoins, il faudra «beaucoup plus de clarté» afin de convaincre les entreprises de s'engager à aller de l'avant avec des nouveaux investissements.

Par ailleurs, le mandat de Raymond Chrétien, négociateur du Québec dans les dossiers du bois d'oeuvre et du papier journal, a été élargi afin qu'il puisse prêter main-forte sur les discussions concernant l'aluminium et l'acier.