Au moment où certains aspects de l'aide gouvernementale accordée aux entreprises du secteur multimédia sont remis en question, l'Alliance numérique a retenu les services d'un lobbyiste pour assurer le maintien des mesures dont ses membres bénéficient.

Étienne Gosselin, de Ryan Affaires publiques, a récemment ajouté un mandat à son inscription au Registre des lobbyistes, notamment afin d'effectuer des représentations auprès du ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation ainsi que du ministère des Finances.

« L'objectif visé est le maintien de mesures de soutien concurrentielles comme le crédit d'impôt pour la production de titre multimédia (CTMM) ainsi que le programme de développement de la propriété intellectuelle dans le secteur du jeu vidéo », peut-on lire.

Les représentations, qui s'effectueront notamment auprès du ministère de l'Économie, des Sciences et de l'Innovation ainsi que du ministère des Finances, visent également à mousser les retombées économiques de cette industrie représentant quelque 10 000 emplois directs et indirects.

Il n'a pas été possible de parler à l'Alliance numérique, mais par courriel, le regroupement a expliqué avoir retenu les services de M. Gosselin en raison de la petite taille de son effectif.

« Nous avons effectivement recours à divers consultants pour nous assister au cours de nos activités », a écrit la coordonnatrice aux communications de l'Alliance numérique, Caroline Emmanuel.

Offert depuis 1996, le crédit d'impôt pour la production de titres multimédia - pouvant couvrir 37,5 % des dépenses salariales admissibles - a notamment incité des multinationales étrangères comme Ubisoft et Warner Bros à s'établir au Québec.

Au cours des derniers mois, cette mesure a fait l'objet de critiques de la part de certains membres du Québec inc., notamment du président et chef de la direction de Stingray, Eric Boyko, et, plus récemment, du grand patron de l'Industrielle Alliance, Yvon Charest.

Alors que la main-d'oeuvre qualifiée se fait rare, M. Boyko déplore notamment que des sociétés étrangères puissent profiter de ces mesures pour recruter des ingénieurs informatiques et d'autres travailleurs spécialisés dans les technologies de l'information, qui sont aussi convoités par des sociétés comme Stingray.

L'homme d'affaires a notamment proposé d'abaisser le taux du crédit d'impôt afin qu'il soit accessible à davantage d'entreprises.

À l'autre bout du spectre, des multinationales comme Ubisoft - qui compte déjà quelque 3600 employés à Montréal et à Québec - font valoir que ce crédit d'impôt est névralgique pour permettre à l'infrastructure en place de poursuivre son développement.

Ce sont ces incitatifs qui ont incité le géant français à annoncer, au début septembre, son intention d'investir 780 millions de dollars dans la province d'ici 2027 afin d'embaucher plus de 1000 employés en plus d'ouvrir deux autres studios - dont un à Saguenay.

« On se rend compte qu'en France ou au Royaume-Uni, après avoir aboli [ce type de mesure], ils s'en mordent un peu les doigts et viennent de la rétablir, avait expliqué à La Presse canadienne le dirigeant des studios d'Ubisoft Montréal, Québec et Toronto, Yannis Mallat. Pendant ces années où il n'y avait pas ce programme, qu'est-ce qui s'est passé ? L'industrie a quasiment disparu. »

En septembre le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) avait également publié une étude suggérant que le crédit d'impôt offert à l'industrie du jeu vidéo n'était pas rentable et qu'il profitait davantage aux sociétés étrangères.

Si le document concédait que les incitatifs financiers avaient permis l'émergence d'un nouveau secteur dans la province, il suggérait à Québec que le moment était venu de repenser ce crédit d'impôt.

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Le secteur du jeu vidéo selon l'Alliance numérique:

- Plus de 10 000 emplois directs et indirects répartis dans au moins 120 entreprises - dont des studios québécois.

- Salaire moyen annuel de 72 000 $ et environ 650 millions versés en salaires chaque année par l'industrie.

- Des retombées économiques de 827 millions ainsi que des recettes fiscales directes de 145 millions pour Québec.