Estimant que la poussière est « retombée » dans le dossier du maintien des sièges sociaux au Québec, le Fonds de solidarité FTQ affirme qu'il est temps de relancer les discussions sur cet enjeu.

Après une année marquée par des débats houleux à la suite des ventes de Rona à l'Américaine Lowe's et des rôtisseries Saint-Hubert à l'Ontarienne Cara, le président et chef de la direction du Fonds, Gaétan Morin, croit que le temps est venu d'interpeller les gestionnaires et les investisseurs particuliers au sujet de l'importance de s'éloigner des stratégies à court terme lorsqu'ils détiennent des actions de sociétés québécoises.

« J'interpelle l'ensemble des gestionnaires de fonds, des caisses de retraite ainsi que les particuliers pour qu'ils reviennent vers une notion d'actionnaire propriétaire [...] pas pour deux ou trois mois, mais pour un investissement à long terme », a-t-il expliqué, lundi, en entrevue, en marge d'une allocution devant le Cercle canadien de Montréal.

Devant un parterre de gens d'affaires, M. Morin a dit qu'une approche d'investissement sur un horizon plus lointain permettrait aux entreprises locales de se développer sur des assises solides.

Concédant que les compagnies québécoises étaient « extrêmement actives » à l'étranger en réalisant plus d'acquisitions que l'inverse, le président du Fonds a néanmoins estimé que la diminution de sièges sociaux au Québec demeure « préoccupante ».

De 2012 à 2014, selon Statistique Canada, le nombre de sièges sociaux établis dans la province est passé de 577 à 568.

Selon M. Morin, au cours des 30 dernières années, le sentiment de fierté entourant la détention d'actions de sociétés québécoises s'est graduellement érodé en raison de la robotisation des transactions ainsi que de la popularité grandissante d'instruments financiers comme les fonds communs de placement et les fonds négociés en bourse.

« Nous sommes devenus des investisseurs dans un instrument financier qui, malheureusement, investit souvent à court terme », a-t-il expliqué.

En vendant des actions et obligations, le Fonds de solidarité FTQ a déjà annoncé qu'il comptait, d'ici 2020, acquérir des blocs d'actions de sociétés québécoises inscrites en Bourse jugées « susceptibles » d'être ciblées par des investisseurs étrangers.

Jusqu'à présent, environ 120 millions de dollars ont été déployés dans le cadre de cette stratégie, selon M. Morin.

Celui-ci croit également que le Québec doit demander des changements aux autorités pancanadiennes en valeurs mobilières afin de mieux outiller les conseils d'administration pour leur permettre de repousser des offres hostiles.

Par ailleurs, il serait surprenant de voir le Fonds de solidarité FTQ s'intéresser à la banque de l'infrastructure dans laquelle le gouvernement Trudeau devrait investir 35 milliards de dollars sur dix ans pour attirer des capitaux détenus par des investisseurs institutionnels.

Compte tenu de la taille de son actif de 11,7 milliards de dollars, le Fonds préfère se tourner vers des projets à vocation socio-économique comme des écoles, des résidences pour étudiants ainsi que des complexes sportifs.

« Cela nous permet de participer, à notre façon, au renouvellement des infrastructures au Québec », a expliqué M. Morin.

Le Fonds prévoit investir 400 millions de dollars dans cette initiative. Les investissements seront assurés par le Fonds immobilier ainsi qu'un promoteur privé local, qui seront propriétaires de l'actif. Les baux varieront entre 25 et 30 ans. Une fois le bail terminé, le Fonds demeurera propriétaire de l'actif.

M. Morin n'a pas complètement fermé la porte à la banque de l'infrastructure fédérale, prévenant qu'une éventuelle participation se ferait à la hauteur des moyens de l'investisseur institutionnel.