Comme leurs semblables du reste du Canada, les jeunes Québécois sont moins nombreux à jouer à la loterie par rapport à leurs aînés et selon un expert, ce n'est pas près de changer.

La clientèle de Loto-Québec est constituée de 17 % de jeunes âgés de 18 à 34 ans, alors qu'ils forment 27 % de la population. Les 35 à 49 ans représentent 25 % de la clientèle, tandis que les 50 à 64 ans forment 35 %.

Danny Racine, porte-parole de Loto-Québec, explique cette tendance par le fait que la loterie traditionnelle - liée au hasard - semble moins intéresser cette génération de jeunes, qui a «besoin de contrôler» le résultat et de se divertir.

On observe le même phénomène dans le reste du Canada. En Ontario, seulement 7 % des adultes de moins de 34 ans participaient au moins une fois par semaine, comparativement à la moyenne de 45 % chez tous les adultes. Dans l'Ouest du pays, environ 47 % des adultes avaient joué à la loterie dans le dernier mois, contre 32 % pour les jeunes de 30 ans et moins.

Selon le professeur Jeffrey Derevensky, qui est directeur du Centre International d'étude sur le jeu et les comportements à risque chez les jeunes de l'Université McGill, il s'agit d'une tendance qui se répète année après année, et qui n'est pas propre à la génération Y ni au Québec.

M. Derevensky souligne que les jeunes adultes sont plus susceptibles d'acheter des billets à gratter qui donnent des résultats dans l'immédiat, ou de participer à des paris sportifs, dont les résultats sont relativement prévisibles.

«Les jeunes sont intéressés à un renforcement immédiat. Ils achètent les ''gratteux'' parce qu'ils n'ont qu'à attendre cinq minutes pour avoir le résultat. Ils ne veulent pas acheter un billet et attendre plusieurs jours pour les résultats. (...) Les plus âgés sont plus intéressés aux plus gros prix... Quand on devient plus mature, on est prêt à attendre», a-t-il soutenu.

«La loterie, ça n'a jamais été le jeu préféré des jeunes. Les jeunes, ce qu'ils ont toujours aimé, c'est les jeux entre amis; les cartes, les paris sportifs, les dés», a remarqué Anne Élizabeth Lapointe, directrice générale du Centre québécois de lutte aux dépendances (CQLD) et directrice générale de la Maison Jean Lapointe, volet prévention.

Selon le résultat de recherches datant de 2013 auprès des plus jeunes - des adolescents âgés de 12 à 17 ans - il existe également des différences chez les garçons et les filles. «Les filles vont préférer davantage les jeux étatisés, donc loteries, le bingo, versus les garçons qui aiment les jeux d'action, comme les cartes, les paris sportifs», a-t-elle expliqué.

Loto-Québec tente d'élargir son offre pour atteindre plus de jeunes, mais selon le professeur Derevensky, «ça ne fonctionne clairement pas». «Il semble que les jeunes soient intéressés par d'autres activités», a-t-il suggéré.

Il croit que la société d'État se concentre davantage à attirer l'attention des jeunes pour qu'ils adoptent éventuellement ces pratiques «lorsqu'ils seront assez vieux».

Mme Lapointe trouve d'ailleurs «dommage» que la société d'État cible ainsi «une clientèle vulnérable». «C'est un peu dommage parce qu'on sait très bien que plus un jeune commence tôt à s'adonner à n'importe quelle dépendance potentielle, il est plus à risque de développer une dépendance à l'âge adulte», a-t-elle affirmé.

Selon la dernière enquête de l'Institut de la statistique du Québec (ISQ) sur le comportement des adolescents du secondaire, 2,7 % des jeunes étaient considérés comme à risque de développer une dépendance au jeu, tandis que 0,9 % était considérés comme des joueurs pathologiques probables.

Bien que l'ISQ ait observé une baisse dans ces chiffres depuis une dizaine d'années, «il reste que certains élèves ont facilement accès aux diverses formes de jeux de hasard et d'argent».

«De plus, malgré son caractère inoffensif pour la plupart, le jeu est un phénomène qui ne doit pas être banalisé», note l'ISQ dans son rapport.