La Société des alcools du Québec (SAQ) ne prend pas tous les moyens à sa disposition pour obtenir le meilleur prix auprès de ses fournisseurs, soutient la vérificatrice générale Guylaine Leclerc.

Elle met en lumière le tiraillement de la société d'État entre deux objectifs : offrir le vin au meilleur prix aux consommateurs et verser des dividendes au gouvernement, qui se fait plus exigeant année après année. Ainsi, si la SAQ obtient d'un fournisseur un prix de départ à la baisse, les revenus versés au gouvernement diminuent aussi, à volume égal de vente. Au bureau du Vérificateur général, on se demande si la société d'État a intérêt dans les circonstances à obtenir le meilleur prix possible pour le consommateur.

« Les moyens mis en place par la SAQ pour favoriser l'obtention des meilleurs prix et des conditions les plus avantageuses peuvent être renforcés », peut-on lire dans le rapport 2016-2017 de la vérificatrice générale, déposée à l'Assemblée nationale mercredi. Par exemple, la SAQ ne va pas chercher de rabais sur le volume ou des revenus de positionnement en magasin auprès des fournisseurs en vue d'obtenir le coût net le plus bas possible.

Des clauses sont manquantes dans les contrats signés par la SAQ lors de l'acquisition d'un nouveau produit, relève la VG. Il n'y a aucune clause financière prévoyant une pénalité si les déclarations du fournisseur sont inexactes et la cessation de l'approvisionnement, par exemple.

Toujours selon la VG, la SAQ n'effectue pas tous les contrôles nécessaires pour vérifier si le prix qu'elle a payé est le même que dans d'autres marchés canadiens comme la LCBO en Ontario. Certes, des informations sont confidentielles, mais il est tout de même possible de faire des vérifications, estime la VG. Or, pour des appels d'offres effectués en 2014-2015, le prix de détail de la LCBO n'est consigné que dans 19% des dossiers et les simulations de prix de départ obtenu par la société ontarienne ne se trouvent nulle part.

En 2014, la SAQ a découvert « des écarts de prix de détail anormaux entre elle et la LCBO ». « Il y avait un risque de non-respect de la clause du meilleur prix départ chais pour 82 sur environ 600 produits courants disponibles à la LCBO, soit 14% ». Pour sept produits, « rien n'était réglé » au 31 mars 2015, déplore la VG.

La VG recommande également que la SAQ révise sa structure de majoration sur le prix de base, pratiquement inchangée depuis des années. Cette majoration vise à couvrir ses frais et à verser des dividendes au gouvernement.

« Plus le prix de départ chais descend, plus la majoration appliquée par la SAQ baisse ce qui, par le fait même, diminue sa rentabilité », écrit la VG. Ainsi, si la SAQ parvient à diminuer le prix de départ d'un vin, la majoration va diminuer elle aussi. « Les efforts quant au prix de départ chais font en sorte que la rentabilité globale diminue si la SAQ ne réussit pas à augmenter le nombre de bouteilles vendues et qu'elle a les mêmes frais de vente à assumer », soutient la VG.

Elle ajoute qu'il y a un écart de prix de détail entre la SAQ et la LCBO pour les vins d'entrée de gamme et ceux de milieu de gamme. Si la SAQ révisait ses prix à la baisse, sa rentabilité diminuerait aussi, souligne la VG. La SAQ subirait une baisse de ses ventes brutes annuelles d'environ 219 millions si elle opérait cette diminution de prix, dans l'hypothèse où il n'y a pas d'augmentation du volume de ventes.

La VG se questionne aussi sur la gestion des ressources humaines à la SAQ. Elle relève qu' « il y a un déséquilibre entre l'achalandage dans les succursales et les heures travaillées par les employés. » En 2014-2015, les journées du lundi au mercredi représentaient 24% de l'achalandage de l'année alors que les heures travaillées équivalaient à 37 %. La VG recommande de corriger la situation en vue de diminuer les coûts et d'augmenter les ventes.

Elle ne se prononce pas sur la pertinence de maintenir le monopole de la SAQ. La Commission Robillard recommandait l'automne dernier de briser ce monopole dans la vente de vins et de spiritueux. Elle avait critiqué la gestion de la société d'État elle aussi

Dans son rapport 2016-201, la VG revisite un classique : les lacunes dans la gestion des contrats informatiques. Cette fois, pour les achats regroupés, « le Centre des services partagés du Québec n'a pas l'assurance que les ministères et organismes ont bénéficié des baisses de prix attendues ou obtenu des modèles reflétant l'évolution technologique ».

La VG constate que le CSPQ a payé 499$ pour une tablette, 60$ de plus que le prix affiché sur le site internet du fabricant. Elle ajoute qu'il n'y a aucun mécanisme « pour s'assurer de l'absence de conflits d'intérêts de toutes les personnes concernées par la détermination des besoins et la préparation des appels d'offres ».