Peu de gens le savent, mais une entreprise d'économie sociale sert les repas au Biodôme et au Planétarium. Pour répondre à l'appel d'offres de la Ville de Montréal, des organismes d'insertion ont uni leurs forces. Le Groupe Part, le Buffet Insère-Jeunes, la Cuisine collective Hochelaga-Maisonneuve, les Petites-Mains, le Chic Resto Pop et la Corbeille Bordeaux Cartierville ont formé le Projet Sol. Rencontre avec ses artisans.

Avant de diriger le Projet Sol, Louis-Simon Larrivée ne connaissait pas l'économie sociale. 

« Je viens du monde de la gastronomie », souligne le dirigeant de 29 ans.

Le projet était en démarrage depuis un an quand il est arrivé au début de 2015. Il a été attiré par le poste de direction et de chef exécutif. « Mes deux intérêts : la gestion et la restauration », explique-t-il.

M. Larrivée a étudié son art à l'ITHQ, à Montréal, et à l'École hôtelière de Laval. Et il est passé par les cuisines de restos renommés, comme le Laurie-Raphaël et le Club Chasse et Pêche. Pour bonifier sa recette, il poursuit un certificat en gestion et administration à l'UQAM.

Le gestionnaire dirige une organisation peu orthodoxe.

Les menus du Sol Resto et du Sol Bistro au Biodôme et ceux du Sol Café au Planétarium offrent des aliments locaux, à 80 % végétariens.

« Nos valeurs reposent sur l'entraide, le respect et l'équité, dit-il. Le travail d'équipe et l'égalité des chances sont mis de l'avant. » Une douzaine d'employés sont en réinsertion sur l'équipe de 20 à 30 personnes.

« Ici, on remet le compteur à zéro, dit-il. On n'est pas là pour juger. Tout le monde est égal, peu importe d'où ils viennent. »

M. Larrivée a choisi de ne pas « tout » connaître de leur passé. « Il faut changer les mentalités en étant plus encadrant, plus compréhensif, dit-il. On prend plus le temps d'expliquer. » C'est ce qu'on devrait faire dans toutes les entreprises, ajoute-t-il.

La vie après la couture

Un beau jour, Jacqueline Paulin en a eu assez.

Assez de séparer les piles de tissus. Assez de couper les fils trop longs. Assez de mettre les vêtements sur les cintres.

Après 30 ans à bosser dans des usines de couture de Montréal-Nord, elle a eu les bleus. « Je voulais faire autre chose, mais j'avais besoin de formation », se rappelle la femme de 54 ans.

Pendant son passage à l'assurance-chômage, elle apprend à faire son CV. Puis, elle est accueillie au Groupe Part, rue Rachel, un organisme de réinsertion de travailleurs, spécialisé en cuisine.

Mme Paulin s'engage alors dans une formation de 30 semaines. Elle choisit sa spécialité. « Les pâtisseries me rendent heureuse », explique-t-elle. 

Après un stage de trois semaines dans une résidence de personnes âgées, elle entre au Projet Sol. Ça fait plus de deux ans. Depuis, cinq jours par semaine, de 7 h à 3 h, elle fait des biscuits santé, des galettes d'avoine, des chocolatines, des muffins. Et bien d'autres choses.

Jacqueline Paulin se sent bien. « J'ai une vie meilleure aujourd'hui. »

Se prendre en main

Edeline Bazard n'a pas un parcours ordinaire.

La femme de 36 ans est arrivée d'Haïti en 2004. Puis, pendant des années, son mari et elle ont fait la navette entre le Québec et le New Jersey. Devant notre étonnement, elle pouffe de rire. « Il travaillait aux États-Unis », explique-t-elle.

Heureusement, en 2010 son mari déniche un emploi dans la câblodistribution à Montréal. Elle quitte alors son travail dans une usine de LaSalle.

La famille emménage à Saint-Michel. À l'époque, le petit Elvens a 3 ans. Samara naîtra deux ans plus tard.

Mme Bazard se tourne vers la filière Emploi-Québec et le Groupe Part, l'organisme montréalais de réinsertion. « J'ai fait une formation en restauration, dit-elle fièrement. On m'a remis une attestation. »

Depuis un an et demi, elle est aide-cuisinière au Projet Sol. Elle prépare les sandwichs, les mayonnaises et les vinaigrettes, faites sur place.

« J'aime mon travail et je ne veux pas le quitter », dit-elle. Le programme de réinsertion l'a amené vers un emploi qu'elle apprécie. « Je conseille aux jeunes de ne pas rester à la maison, dit-elle. Il faut se prendre en main et ne pas hésiter à aller vers les organismes d'aide. »

Photo Marco Campanozzi, La Presse

Après 30 ans à bosser dans des usines de couture de Montréal-Nord, Jacqueline Paulin a eu les bleus. « Je voulais faire autre chose, mais j’avais besoin de formation », se rappelle la femme de 54 ans.

Photo Marco Campanozzi, La Presse

« J’aime mon travail et je ne veux pas le quitter », dit Edeline Bazard. Le programme de réinsertion l’a amenée vers un emploi qu’elle apprécie. « Je conseille aux jeunes de ne pas rester à la maison, dit-elle. Il faut se prendre en main et ne pas hésiter à aller vers les organismes d’aide. »