La vente de Rona au géant américain Lowe's suscite des inquiétudes quant à la pérennité de ce fleuron de l'économie québécoise. Qu'arrive-t-il aux entreprises d'ici, une fois qu'elles ont été vendues? Nous en avons retracé quelques-unes.

Exemples favorables

Van Houtte Keurig

Depuis que Van Houtte a été acquise par l'américaine Green Mountain, en 2010, c'est l'explosion. Quelque 55 millions ont été investis dans l'usine du quartier Saint-Michel, à Montréal, et plusieurs dizaines de personnes ont été embauchées. Le siège social canadien compte un PDG, un VP finance et un VP affaires juridiques, entre autres. Van Houtte s'appelle maintenant Keurig Canada. Elle compte 976 employés au Québec, contre 880 au moment de l'acquisition, en 2010. En décembre 2015, Keurig Green Mountain a accepté une offre d'achat de JAB Holding, un groupe international de cafés. Cette transaction n'est pas encore complétée, mais à l'interne, chez Keurig Canada, on n'est pas inquiet pour les activités montréalaises.

- Francis Vailles, La Presse

Ludia

Le géant anglais de la télévision Freemantle Media est devenu actionnaire minoritaire de ce studio montréalais spécialisé dans les jeux mobiles en 2009, actionnaire majoritaire en 2010 et propriétaire unique en 2014. «Pour eux, il s'agissait de s'inscrire dans une activité qu'ils voyaient comme une menace pour la télévision, explique le fondateur et président de Ludia, Alex Thabet. Le résultat est qu'ils n'étaient pas très impliqués dans la gestion quotidienne. Nous nous sommes donc retrouvés pas mal libres de développer l'entreprise à notre façon, mais avec plus de moyens.» Ludia comptait environ 100 employés en 2009. Elle en a maintenant près de 350.

- Jean-François Codère, La Presse

Aliments Carrière

En 1998, le Groupe Bonduelle a établi Bonduelle au New Jersey, avec un seul employé. Mais quand le transformateur de légumes a acheté 100 % d'Aliments Carrière, en 2007, il a saisi l'occasion pour déménager au Québec sa tête de pont nord-américaine. Huit ans plus tard, le bureau de Montréal du DG de Bonduelle Amériques, Daniel Vielfaure, supervise 1550 employés permanents, 1600 saisonniers, 12 usines et des ventes de 450 millions d'euros. La division produit annuellement 294 000 tonnes de légumes surgelés et 52 000 tonnes de légumes en conserve sous les marques Arctic Gardens, Graves et Bonduelle. Au Québec, les quatre usines de Bonduelle à Bedford, Saint-Denis-sur-Richelieu, Saint-Césaire et Sainte-Martine roulent toujours. Des investissements ont notamment été faits en 2008, 2011 et 2014. La société emploie près de 1000 personnes sur le territoire québécois.

- André Dubuc, La Presse

Bourse de Montréal

En 2008, l'achat de la Bourse de Montréal par le Groupe TSX avait fait grincer des dents dans Québec inc. Aussi, les engagements de TSX envers le développement à Montréal du seul pôle canadien en produits dérivés suscitaient beaucoup de scepticisme. Huit ans plus tard, la Bourse de Montréal multiplie les volumes records de transactions et les bons résultats. Au point de compter pour 17 % des revenus et 22 % du bénéfice de TSX, devenu TMX. La Bourse de Montréal est devenue une «lumière brillante» chez TMX, de l'avis de Phil Hardie, analyste pour Scotia Capital. 

- Martin Vallières, La Presse

Exemples défavorables

AEterna Zentaris

AEterna Zentaris, la biotech-vedette de Québec, n'a jamais été formellement vendue à des intérêts étrangers. Le départ des fondateurs Éric et Luc Dupont en 2007 a toutefois marqué un changement de cap, avec l'arrivée d'administrateurs et de dirigeants américains. Le siège social de Québec a perdu de plus en plus d'influence dans les années suivantes, jusqu'à ce que l'entreprise annonce en 2014 un investissement de 1 million de dollars pour créer un nouveau centre névralgique en Caroline-du-Sud. Les derniers liens avec le Québec ont été coupés en octobre dernier, quand AEterna Zentaris a annoncé la fermeture de son siège social de la Vieille Capitale. La dizaine d'employés restants ont été remerciés. 

- Maxime Bergeron, La Presse

Crocs

L'histoire de Crocs, à Québec, a marqué l'imaginaire collectif. En 2004, les deux inventeurs de ces chaussures en plastique cèdent leur entreprise, Créations Foam, à des investisseurs américains. Le siège social est alors installé au Colorado, et les ventes mondiales explosent. Mais quatre ans plus tard, à la surprise générale, les nouveaux propriétaires annoncent la fermeture de l'usine de la Vieille Capitale. Ils préfèrent transférer la production vers des pays où la main-d'oeuvre est moins coûteuse. Bilan : 669 pertes d'emplois. «C'est un beau cas de capitalisme sauvage», avait déclaré le ministre du Développement économique de l'époque, Raymond Bachand. 

- Marie-Eve Fournier, La Presse



Rio Tinto Alcan

En passant sous le joug de Rio Tinto en 2007, Alcan a vu le nombre de ses employés passablement réduit. Le siège social montréalais comptait alors 860 employés contre 671 aujourd'hui. Deux éléments rendent toutefois difficile la comparaison. À l'époque, Alcan comprenait les divisions emballage et produits usinés, vendus par Rio Tinto. Et aujourd'hui, les 671 employés regroupent les activités de IOC et de l'ancienne QIT. Montréal conserve la gestion mondiale de l'aluminium de Rio Tinto, avec un PDG, un chef des finances et un chef des affaires juridiques. Par contre, les grandes décisions sont prises à Londres ou encore à Melbourne. La division Aluminium de Rio Tinto Canada compte 6200 employés.

- Francis Vailles, La Presse