À la demande du gouvernement, Hydro-Québec partira à la recherche d'occasions d'investir dans la production, le transport et la distribution d'électricité ailleurs dans le monde, une avenue que la société a déjà expérimentée et délaissée.

C'est une des «commandes» que vient de donner le gouvernement de Philippe Couillard à la nouvelle direction d'Hydro-Québec, qui prépare actuellement son plan de développement pour la période 2016-2020.

Ce plan stratégique devra préciser la contribution de la société d'État au Plan Nord et au programme d'électrification des transports, stipule le décret que vient d'adopter le gouvernement. L'actionnaire veut aussi que l'entreprise soit plus transparente et qu'elle maintienne les augmentations de tarifs à un niveau égal ou inférieur à l'inflation.

Ce décret, le premier à dicter des priorités à Hydro-Québec depuis 2009, suscite des réactions mitigées. «C'est presque la table des matières du prochain Plan stratégique d'Hydro-Québec», a commenté hier Pierre-Olivier Pineau, professeur à HEC Montréal et titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l'énergie, qui s'est dit étonné que le décret soit si détaillé.

Le spécialiste voit d'un bon oeil le feu vert donné à la société d'État pour investir à l'étranger. «C'est une bonne chose et c'était une erreur stratégique de s'être complètement recentré au Québec», estime-t-il.

Au milieu des années 2000, Hydro-Québec avait liquidé tous ses investissements à l'étranger et mis fin aux activités de sa filiale Hydro-Québec International. Même si des profits juteux ont été réalisés en vendant certains actifs, notamment au Chili, le rendement de la filiale avait été jugé insatisfaisant. Au fil des ans, Hydro-Québec International avait investi au Chili, au Pérou, au Costa Rica, en Australie, en Chine et aux États-Unis.

Efficacité énergétique

Le président de l'Association québécoise de production d'énergie renouvelable, Jean-François Samray, est lui aussi content de voir qu'Hydro-Québec pourra recommencer à investir hors Québec. «C'est une très bonne nouvelle pour nous», a dit le porte-parole de l'association qui regroupe des producteurs d'énergie comme Boralex et Brookfield.

Le décret gouvernemental incite Hydro-Québec à continuer de développer l'énergie éolienne, mais pour la substituer aux carburants plus polluants dans les réseaux autonomes du Québec.

Jean-François Samray y voit une avenue intéressante pour le secteur éolien, dont le développement est limité par les surplus d'électricité. «On a un travail à faire en substitution», a-t-il souligné.

Le professeur Pineau déplore que le gouvernement n'ait pas insisté davantage sur les économies d'énergie réalisables au Québec et sur l'isolation des maisons. «L'énergie économisée peut être exportée, c'est comme ça qu'Hydro-Québec peut faire plus de profits», insiste-t-il.

Il est aussi déçu que le gouvernement exige des hausses de tarifs inférieures ou égales à l'inflation. «Il ne semble pas y avoir de place pour l'innovation tarifaire qui enverrait un meilleur signal de prix pour augmenter l'efficacité énergétique», regrette Pierre-Olivier Pineau. Il rappelle qu'Hydro-Québec produit 35 000 mégawatts, dont 15 000 mégawatts «dorment pendant six mois, quand on ne chauffe pas».

Le prochain Plan stratégique d'Hydro-Québec pour 2016-2020 devra être remis au gouvernement avant le 30 juin 2016. Le dernier Plan remonte à 2009, pour la période 2009-2013.