Si elle est favorable à la Commission de révision permanente des programmes, l'Association des économistes québécois croit qu'elle devra avoir une liste de critères bien définis dans un horizon à moyen et long terme pour donner une marge de manoeuvre au gouvernement.

Alors que s'amorce la deuxième phase des travaux de cette commission chargée de dégager des économies de 3,2 milliards $, le regroupement d'économistes a transmis au gouvernement Couillard ses observations en plus de procéder à une série de recommandations.

«La précipitation est souvent mauvaise conseillère, fait valoir le directeur général de l'Association, Bernard Barruco. Dans l'urgence que le gouvernement a décrété (la révision), il faut éviter de créer des imprévus qui peuvent réapparaître dans quelques années.»

Considérant qu'il est nécessaire de freiner la croissance des dépenses gouvernementales, l'Association met également en garde contre l'approche de révision «mur à mur», soulignant qu'il serait efficace, lorsque la situation l'exige, d'allouer plus de ressources à certains programmes.

Au cours d'un entretien téléphonique, M. Barruco a affirmé qu'il était impératif de moderniser l'approche des programmes, puisque la situation économique actuelle ne permet plus d'avoir des taux de croissance des dépenses aussi élevés que par le passé.

«On peut faire des compressions, mais il y a certains programmes où il serait pertinent d'augmenter les dépenses, dit-il. Selon la cible, il y a sûrement certains volets où l'on peut réduire un peu plus pour bonifier d'autres mesures.»

Par exemple, l'Association rappelle l'importance d'éviter de «tomber dans le piège» de moins bien entretenir les infrastructures pendant cinq à dix ans pour ensuite être aux prises avec un rattrapage difficile à gérer.

La mise à jour automnale effectuée au début du mois de décembre par le ministre des Finances, Carlos Leitao, prévoyait une croissance des dépenses consolidées de 2,2% pour 2014-2015 ainsi que de 1,2% pour l'exercice suivant.

En dépit de questions entourant la deuxième phase des travaux de la commission, M. Barruco réitère la nécessité de celle-ci, notamment parce que la croissance économique des prochaines années ne sera pas aussi vigoureuse que pendant les années précédant la dernière récession.

Selon le directeur général du regroupement d'économistes, une liste de critères adéquate devrait permettre au gouvernement de se réserver un coussin - en plus de renouer avec l'équilibre budgétaire - afin de stimuler l'économie par le biais de diverses mesures.

«On ne peut plus continuer au rythme où l'on va, affirme M. Barruco. C'est important de mettre à jour nos futurs outils de développement. Cela va profiter aux recettes fiscales en plus d'accroître les recettes.»

L'Association souligne dans son document que le service de la dette a monopolisé cette année plus de 11% des dépenses consolidées du gouvernement du Québec.

Elle avance aussi qu'une hausse d'un point de pourcentage du taux d'intérêt moyen sur une dette de 200 milliards $ se traduirait par une dépense annuelle supplémentaire de 200 millions $ à court terme.

Au même moment où les employés de l'État et le gouvernement Couillard ne sont pas sur la même longueur d'ondes en ce qui a trait au renouvellement des conventions collectives, l'Association s'avance prudemment sur ce terrain.

Reconnaissant que la rémunération globale des fonctionnaires représente plus de 60% des dépenses budgétaires de programmes, elle croit que Québec doit «s'acquitter avec discernement de ses responsabilités d'employeurs».

«Nous disons au gouvernement (...) d'agir pour garder de bonnes ressources (...) mais d'évaluer la qualité et les résultats que l'on peut atteindre avec les effectifs disponibles», explique M. Barruco.

S'il ne s'avance pas dans les négociations entre Québec et ses employés, le directeur général de l'Association croit néanmoins que les travailleurs de la fonction publique doivent être «incorporés» dans la révision des programmes.

«Je n'ai aucun problème avec le nombre de fonctionnaires, mais est-ce qu'on les utilise à bon escient? Est-ce qu'on leur demande d'accomplir des tâches à la hauteur de leur capacité et qu'est-ce qu'on leur donne comme outils pour faire leur travail?» demande-t-il.

Ce dernier n'a par ailleurs pas voulu commenter le contenu du rapport déposé en novembre dernier par la commission présidée par l'ex-ministre libérale Lucienne Robillard.