Revenu Québec va vérifier si Bombardier échappe au fisc québécois, a indiqué mercredi le ministre des Finances, Carlos Leitao.

Selon des documents confidentiels divulgués par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), l'avionneur et constructeur de matériel roulant a transféré des centaines de millions de dollars au Luxembourg, un paradis fiscal européen, pour épargner de l'impôt.

Grâce à un mécanisme complexe et sinueux de transit de fonds vers des filiales de l'entreprise au Luxembourg via une filiale américaine dans l'État du Delaware, Bombardier serait ainsi parvenue, légalement, à réduire sa facture fiscale au Canada.

Au terme d'une allocution à Québec devant 400 invités du Cercle de la finance et de l'Association des économistes québécois, le ministre Leitao a dit croire que Bombardier acquitte ses impôts au pays, conformément aux lois québécoises et canadiennes.

«En ce qui concerne la contribution complète de Bombardier aux coffres des gouvernements du Québec et du Canada, je pense que cela se fait, a déclaré M. Leitao en point de presse. Je pense que l'on reçoit ce que l'on doit recevoir.»

À son avis, le «stratagème» luxembourgeois utilisé par nombre de grandes entreprises multinationales, dont Disney et Skype, n'implique que les impôts dus en territoire européen.

«Spécifiquement, ce qui se passe au Luxembourg - le Luxileaks - c'est très particulier à l'Union européenne, a-t-il expliqué. Ce stratagème, à mon avis, s'applique essentiellement aux activités européennes et paneuropéennes de plusieurs multinationales. D'ailleurs, la solution à ça, on la vu, c'est l'Union européenne qui va mettre de la pression sur le Luxembourg pour qu'il change (ses façons de faire).»

Néanmoins, le ministre des Finances, qui est aussi responsable du Revenu, a fait savoir que Revenu Québec fera les vérifications d'usage.

«Encore une fois, en ce qui a trait aux taxes et aux impôts payables ici au Québec et au Canada, je ne pense pas qu'il y a un enjeu, a-t-il insisté. Il va falloir que Revenu Québec regarde cette information. On va voir si ça nous affecte d'une façon ou d'une autre - je ne le pense pas - mais il va falloir regarder pour pouvoir se prononcer là-dessus.»

Dans un courriel laconique, mercredi, Bombardier a assuré respecter à l'échelle mondiale toutes les lois applicables, incluant le droit fiscal.

Fleuron du génie industriel québécois, Bombardier est un grand bénéficiaire d'aide publique.

L'an dernier, une étude de l'Institut Fraser classait Bombardier au deuxième rang - derrière Pratt & Whitney Canada - des 25 entreprises ayant le plus profité du soutien financier fédéral avec au-delà d'un milliard de dollars entre 1961 et 2012.

Le gouvernement du Québec est aussi régulièrement mis à contribution. Par l'intermédiaire de la Caisse de dépôt et placement et Investissement Québec, le gouvernement québécois a injecté 450 millions $ cette année dans le projet de Ciment McInnis, contrôlé par la famille Beaudoin-Bombardier.

À la fin du mois d'octobre, le président et chef de la direction de Bombardier, Pierre Beaudoin, avait affiché son mécontentement devant la décision du ministre Leitao de réduire de 20 pour cent une série de crédits d'impôt pour les sociétés. Il avait laissé entendre que la décision du gouvernement Couillard de sabrer dans les avantages fiscaux risquait d'influencer les choix d'investissement de l'entreprise.